Reporters sans frontières appelle à la lutte contre l’impunité

En cette journée de commémoration du troisième anniversaire de l’exécution de 32 professionnels des médias à Ampatuan, dans la province de Maguindanao, Reporters sans frontières appelle le gouvernement philippin à tout mettre en oeuvre pour ne pas laisser ces crimes impunis.

“Nous rappelons notre soutien aux familles des 32 journalistes exécutés lors de ce qui fut le le plus grand massacre de journalistes jamais perpétré. Nous réaffirmons également notre engagement dans la lutte contre l’impunité pour que cette journée noire du 23 novembre 2009 ne soit pas oubliée. Nous demandons que la lumière soit faite sur ce massacre et que justice soit rendue aux victimes. A cet effet, une assistance supplémentaire doit être apportée aux familles, répondant aux besoins individuels de chacune d’entre elle”, a déclaré Reporters sans frontières.

   

“Nous rappelons que le 14 juin 2012, une résolution a été prise par le Parlement européen pour lutter contre l’impunité aux Philippines. Dans son sixième point, le Parlement demande notamment au gouvernement philippin ‘de garantir la protection appropriée des défenseurs des droits de l'homme, des syndicalistes et des journalistes, d'enquêter et de condamner comme il se doit les attaques contre les journalistes, ainsi que d'introduire dans le droit national des dispositions interdisant ces actes et prévoyant des sanctions pénales’. Il est urgent que les autorités démontrent leur volonté de voir ces recommandations réalisées”, a ajouté l’organisation.

   

Malgré une relative inertie de l’affaire, de nouveaux développements sont survenus en 2012. Le 4 juillet, Lakmodin Saliao, un ancien collaborateur du gouverneur de Maguindanao, a identifié Anwar Ampatuan et Akmad Ampatuan, deux des principaux commanditaires présumés, en tant que participants au massacre de 2009. 

   

Quelques mois auparavant, tout laissait croire que la situation n’allait pas s’améliorer. Depuis l’ouverture du procès le 8 septembre 2012 à Manille (capitale), des familles de victimes et des témoins de l’affaire ont fait l’objet de menaces et ont été la cible d’assassinats. Le 28 mai 2012, Esmail Enog, témoin du massacre en 2009, a été retrouvé mort : il s’agit du troisième témoin tué depuis l’ouverture de l’enquête. En février 2012, le procureur adjoint en charge de l’affaire, Nestor Lazaro, décédait, laissant de nombreuses interrogations quant à la suite du procès.

   

Près de trois ans après l’ouverture du procès, pas un seul suspect, sur près de deux cents identifiés par les autorités locales, n’a été reconnu coupable d’avoir participé à la tuerie. L’enlisement du procès est notamment lié aux problèmes de procédures, soulevés par la défense dans une volonté évidente de bloquer la progression du procès.

   

Le 23 novembre 2011, à l’occasion de la deuxième commémoration du massacre, Reporters sans frontières avait déjà appelé à ce qu’une justice impartiale soit rendue dans les plus brefs délais.

   

Les Philippines, classées à 140ème place, sur 179 pays, dans le classement mondial 2011-2012 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières, restent un pays particulièrement dangereux pour les professionnels des médias : en 2012, cinq journalistes ont été tués.

     

Chronologie sélective :

   

  • Le 23 novembre 2009 aux Philippines, trente-deux professionnels des médias ont été exécutés par la milice privée du gouverneur de la province de Maguindanao (Sud).
  • Au moment de son élection en 2010, le président Benigno Aquino avait promis qu’il ferait justice dans l’affaire d’Ampatuan, évoquant le “respect des droits de l’homme et de la liberté de la presse”.
  • Le 6 février 2012: un policier accusé dans l’affaire du massacre de 2009 se suicide. Le 2 décembre 2009, il avait avoué, sous serment, l’implication d’Andal Ampatuan Jr dans le massacre.
  • Le 11 mars 2012, Andal Ampatuan Sr est transporté à l’hôpital. Il est placé en soins intensifs.
  • Le 26 mars 2012, Anwar Ampatuan Jr, petit fils d’Andal Ampatuandu gouverneur de Maguindanao au moment des faits, était arrêté en tant que suspect dans le cadre de l’enquête.
  • Le 28 mai 2012, Esmail Enog, témoin du massacre en 2009, était retrouvé mort.
  • Le 27 juin 2011, la Haute Cour en charge de l’affaire a interdit la couverture en directe des délibérations par les médias, au nom du droit à un procès équitable.
Publié le
Updated on 08.04.2022