Quatre-vingt points pour les utilisateurs de Weibo respectueux de la censure

Lire en chinois / 看中文 Reporters sans frontières dénonce les nouvelles conditions d’utilisation mises en place par le site de microblogging Sina Weibo pour réguler les contenus postés par les utilisateurs. Ces conditions, entrées en vigueur le 28 mai 2012, introduisent un système de points destiné à sanctionner les futures infractions, et notamment la publication de “fausses rumeurs”. “Sous la pression des autorités chinoises, Sina Weibo franchit un nouveau palier dans sa collaboration avec les censeurs du Web. Ce nouveau système de contrôle tend à renforcer la pression individuelle sur les microblogueurs, de plus en plus nombreux et créatifs, et qui réussissent à contourner la Grande muraille électronique et à évoquer des sujets sensibles que les autorités souhaitent étouffer. Reste à voir si et comment ce système de points sera appliqué face à la masse d’informations qui circulent sur cette plate-forme. Une telle initiative ressemble plutôt à un combat perdu d’avance, de la part d’une entreprise désireuse de soigner son image auprès des autorités. Sina Weibo ne doit cependant pas perdre de vue la réaction de ses utilisateurs, qui pourraient être échaudés par l’accumulation de restrictions et se rediriger vers d’autres plate-formes qui font preuve de moins de zèle en ce qui concerne l’auto-régulation de leurs contenus”, a déclaré Reporters sans frontières. L’article 13 des conditions d’utilisation liste les actions proscrites comme “répandre des rumeurs”, “nuire à l’unité de la nation”, “mettre en danger la sécurité nationale”, “perturber l’ordre social”, etc. L’article 14, quant à lui, interdit la propagation de fausses informations. L’utilisation de mots codés, d’homonymes (les mots "tomate" et "ragoût", par exemple, qui se disent “bo” et “xi” en chinois, avaient été utilisés pour faire référence à Bo Xilai) et d’abréviation pour contourner la censure sera également réprimée. “Ces restrictions ne sont pas nouvelles et s’appliquent déjà à tous les internautes chinois qui subissent régulièrement la censure directe des autorités ou indirecte par le biais de l’auto-régulation des différentes plates-formes”, rappelle Reporters sans frontières. “Sur Weibo, des comptes sont régulièrement fermés et des posts effacés par les modérateurs du site. Sina Weibo avait même bloqué la publication de commentaires pendant trois jours en avril dernier au moment où l’affaire Bo Xilai embarrassait le pouvoir.” L'innovation réside dans le système de crédit de points. Chacun des 300 millions d’utilisateurs de Weibo se verra attribuer 80 points de départ. Pour chaque infraction aux conditions d’utilisation, un nombre prédéfini sera retiré. Lorsque le nombre de point aura atteint zéro, le compte de l’utilisateur sera fermé. Les utilisateurs avec peu de points pourront en regagner s’ils ne commettent pas d’infractions pendant deux mois ou s’ils participent à des activités non spécifiées de promotion, d’après le New York Times. Un Conseil communautaire composé d'utilisateurs réguliers de Weibo, ainsi que de membres “experts”, selon le site web CAIJING.com.cn, sera en charge de superviser et de mettre en œuvre ces nouvelles règles. En mars 2012, la Chine, dont le système de censure et de surveillance du Web est l’un des plus sophistiqué au monde, et qui fait partie des “Ennemis d’Internet”, avait déjà introduit une nouvelle règle exigeant des utilisateurs de microblogs qu’ils s’enregistrent sous leur vrai nom. Mais la plupart des sites de microblogging, dont Weibo, ont eu du mal à faire respecter cette règle. Avec ces nouvelles conditions d’utilisation, les utilisateurs auront également la possibilité de regagner des points en révélant leur véritable identité. Les autorités ont également imposé aux sites de microblogging, dont Sina Weibo, Sohu, NetEase, Hexun, etc, d’engager des modérateurs pour surveiller leurs plates-formes et “nettoyer” les contenus problématiques. Dès 2010, ces sites avaient été contraints de se doter d’un "commissaire d’auto-discipline" chargé d’assurer la censure. Ce dernier a pour mission de surveiller et de censurer tout ce qui pourrait mettre en danger la sécurité et la stabilité de la société : les informations liées à des activités illégales, à la pornographie ou à la violence ; les rumeurs infondées ; les questions politiques.
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Mise à jour le 20.01.2016