Perquisitions au Point et à L'Equipe : une nouvelle violation du droit à la protection du secret des sources

Les rédactions du Point et de L'Equipe ont été perquisitionnés le 13 janvier par des policiers de l'Inspection générale des services, dans le cadre d'une enquête « pour violation du secret de l'instruction » liée à l'affaire Cofidis. Reporters sans frontières s'inquiète de ces nouvelles menaces qui pèsent sur la protection des sources et rappelle que les journalistes ne sont pas des auxiliaires de police.

La juge d'instruction du tribunal de Nanterre, Katherine Cornier, a mené, le 13 janvier 2005 entre 10h10 et 12h45, une perquisition au siège de l'hebdomadaire Le Point à Paris. Elle était accompagnée d'une dizaine de policiers de l'Inspection générale des services. Cette décision intervient dans le cadre d'une enquête « pour violation du secret de l'instruction », en marge du dossier de dopage au sein de l'équipe cycliste Cofidis. Les policiers ont relevé tous les numéros de fax de l'hebdomadaire et saisi deux ordinateurs appartenant aux journalistes Olivia Recasens et Jean-Michel Décujis, afin de tenter d'identifier leurs sources. Le journaliste Christophe Labbé est entendu par la police et la juge d'instruction cet après-midi et Jean-Michel Décujis le sera le 14 janvier au matin. Presque simultanément, le quotidien L'Equipe, dont le siège social est situé à Issy-les-Moulineaux, était perquisitionné par la juge d'instruction de Nanterre, Isabelle Prévost-Desprez, dans le cadre de la même affaire Cofidis. « Nous apportons notre soutien aux journalistes et à la direction du Point et de L'Equipe, et appelons les autorités judiciaires à respecter le droit à la protection du secret des sources, garanti par l'article 109 du code pénal et par l'article 10 de la Convention européenne des Droits de l'homme. En aucun cas, il ne faudrait que la justice considère les journalistes comme des auxiliaires de la police. Le secret des sources est un principe intangible ne pouvant souffrir aucune exception. Nous considérons que cette gesticulation judiciaire a pour seul but d'impressionner les sources des journalistes », a déclaré Reporters sans frontières. Une information judiciaire a été ouverte début 2004 par le parquet de Nanterre pour violation du secret de l'instruction, à la suite de la publication dans Le Point du 22 janvier 2004 d'extraits de transcriptions d'écoutes téléphoniques ordonnées par le juge Richard Pallain dans l'affaire de dopage visant les coureurs cyclistes de l'équipe Cofidis. Cette divulgation des écoutes pouvait laisser penser à une violation du secret de l'instruction. La justice avait exigé, le 14 décembre, que la direction du Point fournisse dans les meilleurs délais un organigramme complet du journal, avec les coordonnées détaillées de tous les employés (numéros de téléphone et fax). Franz-Olivier Giesbert, PDG du journal, s'était contenté d'adresser au juge l'organigramme de la rédaction tel qu'il est publié dans les pages de l'hebdomadaire. L'Equipe avait, pour sa part, publié, le 9 avril 2004, de larges extraits des procès-verbaux d'audition de plusieurs coureurs de Cofidis, pour certains mis en examen dans cette affaire de trafic présumé de produits dopants au sein de l'équipe cycliste. Le juge des référés de Nanterre, après assignation en justice de L'Equipe par la direction de Cofidis, avait alors jugé que les journalistes du quotidien n'étaient pas tenus au secret de l'instruction. Reporters sans frontières, la Fédération française des agences de presse et des reporters de la presse écrite et audiovisuelle ont formé en septembre 2004 un groupe de travail dont l'objectif est de présenter des propositions concrètes et précises au ministère de la Justice afin que la protection du secret des sources soit définitivement garantie.
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Mise à jour le 20.01.2016