Nouvelle loi sur la presse : Les autorités imposent un tour de vis

Lire en arabe (بالعربية) Reporters sans frontières est consternée par le décret royal promulgué le 18 septembre 2012, qui restreint drastiquement la liberté de l'information. Le 30 août 2012, l’organisation avait exprimé ses plus vives inquiétudes sur le projet de loi visant à modifier le code de la presse en Jordanie, et avait, par la suite, écrit au Président du Sénat lui demandant de rejeter ce projet de loi liberticide. « Ces nouvelles restrictions à la liberté d’expression, notamment pour les médias en ligne, balaient d’un revers de la main les promesses de réformes annoncées par le gouvernement au plus fort du printemps arabe en 2011. La loi, qui impose aux 220 sites d’information que compte la Jordanie d’obtenir une accréditation du gouvernement pour rester en ligne, s’inscrit dans l’optique d’un contrôle plus accru des médias, alors même que la Toile a joué un rôle important de mobilisation et d’information des populations arabes », a déclaré l’organisation. La nouvelle loi de la presse et des publications met la Jordanie en porte-à-faux avec les standards internationaux en matière de liberté de l’information, notamment l’article 19 sur la liberté d’opinion et d’expression du Pacte international des droits civils et politiques. « Les nouvelles dispositions appelées à réguler le travail des sites d’information en ligne constituent, de facto, une véritable épée de Damoclès pour les journalistes dont la ligne éditoriale est contraire à celle du gouvernement », a rajouté l’organisation. Au-delà du danger que cette loi représente pour l’indépendance des médias en Jordanie, elle érige en règles d’or la censure et les poursuites contre les professionnels des médias lorsque sont traités, sur la Toile, des sujets sensibles. Ainsi, tout contenu jugé, de manière discrétionnaire, non conforme à ces nouvelles lois, sera systématiquement censuré, en vertu de l’article 49 paragraphe 7. L’organisation s’inquiète plus particulièrement des abus judiciaires que rend possible le manque de précision des termes utilisés pour définir les infractions. L’article 42, paragraphes 1 et 2, fait référence à des crimes “contre la sécurité intérieure et extérieure”, sans apporter de définition précise. Autre élément préoccupant : l’interdiction de publication qui toucherait la presse écrite ainsi que les sites d’information. La délivrance ou non d’une autorisation, ainsi que son renouvellement par la Commission de l’audiovisuel placent les professionnels des médias et responsables de sites dans une situation précaire et créent un grave risque d’autocensure. L’obligation d’adhésion à un syndicat pose également question, du fait du manque d’indépendance de l’institution. Le journaliste doit être libre d’adhérer ou non à une association et de choisir le syndicat auquel il veut adhérer. Enfin, l’article 49, paragraphes 3, 4 et 5, rend les sites d’information juridiquement responsables du contenu des commentaires publiés au bas des articles ou des sujets traités. Les journalistes jordaniens ont condamné en grande majorité l’adoption de la loi en organisant des sit-in quotidiens à Amman. De nombreux sites d’information ont protesté en affichant sur leur page d’accueil un éditorial noir. D’autres journalistes ont manifesté à Amman, les 19 et 20 septembre, pour réclamer la suppression de ces amendements, refusant de travailler sous la menace et dans la terreur des poursuites.
Publié le
Updated on 20.01.2016