Médias muselés ou menacés, pas de progrès pour la liberté de l’information

Alors que la 19ème session du Conseil des droits de l'homme s'ouvre, le 27 février 2012, à Genève, Reporters sans frontières appelle l'ensemble de ses membres à adopter une résolution condamnant les violations de la liberté de l'information par le gouvernement sri lankais, et à exiger la fin des violences et menaces à l'encontre des médias et des défenseurs des droits de l'homme au Sri Lanka. "Depuis plus d'un an, nous constatons de nouvelles formes de la censure et la dégradation des conditions de travail des journalistes malgré la fin officielle du conflit avec le LTTE en 2009. Les membres du conseil ne doivent pas attendre l'examen périodique universel pour faire des recommandations, mais voter une résolution pour inciter le gouvernement à véritablement engager des mesures visant l’amélioration de la liberté de l’information", a déclaré Reporters sans frontières. "Certes, le nombre d’agressions, de menaces de mort et d’emprisonnements a baissé en 2010 et 2011, mais les autorités continuent d’empêcher la presse de jouir d’une réelle liberté éditoriale, et l’exil est encore la triste réalité de nombreux journalistes. Les médias sri lankais et étrangers sont toujours dans l’incapacité de couvrir la question des crimes de guerre, qui sera au centre des discussions lors de la 19e session du conseil. Les entraves au travail des journalistes qui souhaitent informer des activités de la Lesson Learnt and Reconciliation Commission (LLRC), voir l’autocensure sur ce sujet par peur de représailles, appellent une réaction immédiate. Le conseil des droits de l’homme doit rappeler le rôle critique primordial joué par les médias, et enjoindre le gouvernement sri lankais à respecter la liberté de l’information”, a ajouté l'organisation. “Nous attendons du gouvernement sri lankais qu’il accepte les questions constructives de la part de la société civile, et cesse de taxer de “conspirateurs” et de “complices du LTTE" ceux qui émettent des critiques à son encontre” , a conclu Reporters sans frontières. Chronologie janvier-février 2012: Violences, menaces et propagande à l’encontre des journalistes et défenseurs des médias, jugés trop critiques, n’ont pas cessé. La censure des sites Internet, notamment ceux basés à l’étranger, s’est même accrue depuis 2011. Les événements des deux derniers mois suffisent pour rendre compte du traitement réservé aux professionnels des médias par le gouvernement. 25 février 2012: Le site d'information TamilNet est victime d'attaques de déni de service (Distributed Denial-of-Service Attack, DDoS). La rédaction lutte pour maintenir le site en ligne. (voir le communiqué sur TamilNet) 23 février: S’est tenue la troisième audience de la Cour Suprême concernant la blocage des sites d’informations. Le 6 novembre 2011, quatre sites d’information indépendants majeurs, SriLankaMirror, SriLankaGuardian, Paparacigossip9, et LankaWayNews, avaient été bloqués sur ordre du ministère de l’Information, qui avait annoncé la veille que “(désormais) tout site d’informations portant sur le Sri Lanka, (devait) s’enregistrer auprès du ministère”. 16 février: Le ministre de la défense a publié un article dans lequel il accuse les journalistes en exil de la Journalist for Democracy in Sri Lanka (JDS), de “traitrise et complot” contre le gouvernement et ses forces de sécurité, à l’aune de la 19eme session du Conseil des droits de l’homme. 15 février: Prasad Purnimal Jayamanne, journaliste freelance pour la BBC (service cingalais) et membre de la South Asian Free Media Association (SAFMA) , a été roué de coups alors qu'il couvrait les manifestations de pêcheurs, qui ont vu la mort d’un des leurs, tué par la police et qui ont fait d’autres blessés, à Chilaw, à environ 100 km au nord de Colombo. Le journaliste, qui filmait les protestations à l’aide d’une caméra, a dû être hospitalisé. 8 février : Le quotidien Dinamina, propriété de l’Etat, a accusé le Free Media Movement d’empêcher la démocratie et la liberté au Sri Lanka, de donner une mauvaise image du Sri Lanka à l’étranger et d’inciter au séparatisme et au terrorisme.” 26 et 27 Janvier : Le ministre des Médias, Keheliya Rambukwella, a accusé des journalistes étrangers de collaborer avec des membres du LTTE, et avec des médias et des ONG étrangers pour ternir l’image du Sri Lanka. Il a affirmé disposer d’une liste de journalistes qui travaillent contre le gouvernement, incluant les organisateurs de la campagne “Black January”. Cette campagne se réfère aux atteintes à la liberté de la presse des trois dernières années, et particulièrement à l’intégrité physique des journalistes, survenues à chaque fois pendant le mois de janvier. L’assassinat de Lasantha Wickrematunge, célèbre directeur du Sunday Leader, il y a un peu plus de trois ans, et la disparition du caricaturiste politique Prageeth Ekneligoda, en janvier 2010, sont devenus les symboles des violences subies par les médias et de l’impunité dont jouissent leurs auteurs. 25 Janvier, (et les jours suivants) : Après la manifestation dans le cadre de la campagne “Black January” organisée par l’”Alliance of Media Organizations in Sri Lanka”, contrainte de changer son lieu de manifestation à cause d’une contre manifestation organisée par les supporters du gouvernement, certains organisateurs du rassemblement ont été suivis par des individus non identifiés, et ce pendant plusieurs jours. 10 Janvier : le gouvernement a accusé le FMM de collaborer avec l’opposition politique et d’organiser une campagne contre des subventions de l’Union européenne accordées au Sri Lanka. 5 janvier: Dans le cadre de la procédure judiciaire en cours suite au meurtre du journaliste Dharmeratnam Sivaram en 2005, le juge P. Surasena de la Haute Cour de Colombo a décidé de reporter l'audience et a dissous le jury, appelé pour l'audience, après que le procureur a affirmé que la procédure ne pouvait se poursuivre faute de présentation de six témoins, dont deux policiers, devant la cour. Le journaliste avait été enlevé et tué, avant que son corps ne soit retrouvé, le 29 avril 2005, près du Parlement sri lankais à Colombo. Janvier (début du mois) : La chaîne de télévision Independent Television Network (ITN), contrôlée par l’Etat, a transmis des images d’activistes pour la liberté de la presse participant à des manifestations pendant la session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies de septembre 2011, les accusant de faire partie du LTTE.
Publié le
Updated on 20.01.2016