L'organisme de régulation censure à nouveau un magazine d'opposition

Reporters sans frontières condamne énergiquement la décision de l'organisme éthiopien de régulation des médias (Ethiopian Broadcasting Authority – EBA) de priver de licence le magazine bi-mensuel d'opposition Addis Times. Ce titre avait été créé suite à la fermeture par les autorités de l'hebdomadaire critique Fitih, en août 2012. "L'acharnement des autorités contre Addis Times et ses employés révèle la vigueur avec laquelle le gouvernement éthiopien est déterminé à altérer la liberté de la presse pour faire taire les critiques", a déclaré Reporters sans frontières. "Les motifs invoqués par l'EBA ne sont pas de nature à justifier une mesure aussi sévère que la fermeture d'un titre de presse. Cette sanction doit être immédiatement levée. Nous demandons aux autorités de mettre un terme au harcèlement de Addis Times et de ses journalistes." Dans une lettre datée du 10 janvier 2013, l'EBA reproche à Addis Times d'avoir omis de signifier un changement de propriétaire et d'adresse, de n'avoir pas transmis aux Archives nationales les deux exemplaires obligatoires pour chacune de ses publications, et d'avoir un financement opaque. Les autorités n'ont fourni aucune preuve pour étayer leurs allégations et appuyer leur décision. Le directeur général de Addis Times conteste chacune de ces accusations et considère que la sanction est illégale et anti-constitutionnelle. La loi éthiopienne précise en effet que, si de telles infractions à la loi étaient constatées, le magazine serait passible d'une amende de 15 000 birr (602 euros), mais en aucun cas de fermeture administrative ou de révocation de licence. La Constitution garantit quant à elle la liberté d'expression et la liberté de la presse. Héritier de l'hebdomadaire Fitih, suspendu définitivement par les autorités en août 2012 après avoir subi, tout au long de ses parutions, une avalanche de poursuites judiciaires, Addis Times n'aura circulé que quatre mois. Son directeur général, Temesgen Desalegne, est sous le coup de nombreuses autres inculpations liées à son activité journalistique et doit comparaitre aujourd'hui devant la Haute Cour. Il est entre autres poursuivi pour "dangereuse désinformation", "incitations aux troubles contre l'ordre constitutionnel" et "campagne diffamatoire contre le gouvernement", charges pour lesquelles il a été maintenu en détention six jours en août dernier. L'Éthiopie, 137e sur 179 pays au classement 2013 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières, perd une dizaine de place par rapport à l'année précédente. Si deux journalistes suédois arrêtés en 2011 ont été libérés, le maintien en détention de plusieurs journalistes locaux et l’application liberticide de la loi anti-terroriste de 2009 suscitent toujours l'inquiétude de l'organisation. Plus d'information sur la liberté de l'information en Éthiopie.
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Mise à jour le 20.01.2016