Levée du blocage de Twitter : les autorités pakistanaises reviennent sur une décision attentatoire à la liberté d’expression

Reporters sans frontières prend note de la levée du blocage imposé au réseau social Twitter, le 20 mai 2012, près de douze heures après sa mise en place. La décision avait été prise par le ministère de la Technologie de l'information, qui aurait ensuite ordonné à l’Autorité des télécommunications du pays (PTA) de rendre le site inaccessible en raison d'un "contenu blasphématoire", en l'occurrence un concours de caricatures de Mahomet. “Le blocage d’un réseau social, même d’une durée limitée, constitue une atteinte inacceptable à la liberté d’expression et une entrave supplémentaire à l’accès à l’information. Outre son caractère totalement disproportionné, ce type de méthode est non seulement inefficace, car facilement contournable, mais également contre-productif. Le concours de caricatures dénoncé par les autorités a ainsi bénéficié d’une publicité sans précédent”, a déclaré Reporters sans frontières. “Twitter connaît un succès croissant au Pakistan et a acquis le statut de plate-forme alternative de libre expression et d’échanges d’opinions sur les sujets politiques et sociaux. Les autorités pakistanaises doivent prendre leurs responsabilités et faire en sorte qu’une telle mesure, indigne d’un régime démocratique, ne se reproduise pas.” Un porte-parole de la PTA a déclaré à l’Agence France-Presse que "Facebook et Twitter étaient impliqués. Nous avons négocié avec les deux. Facebook a accepté de retirer le matériel (incriminé), mais Twitter ne nous répond pas". En conséquence, Facebook est disponible mais Twitter reste bloqué. D’après le quotidien Dawn, Twitter a refusé de retirer les contenus visés. Les autorités doivent également faire preuve de transparence quant aux conditions effectives de la mise en place du filtrage du site. Un porte-parole de la PTA a déclaré avoir demandé aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) de procéder au blocage. Pourtant, selon Wahajuz Siraj, un responsable de l’Association des fournisseurs d’accès du Pakistan (ISPAK), la PTA aurait procédé directement au blocage en amont des FAI et sans les notifier. Le blocage de Twitter a donné lieu à de nombreuses réactions chez les internautes pakistanais. L’ONG Bytes for All, Pakistan, avait aussitôt mis en place un service d’aide au contournement de la censure sous la forme d’un “Rapid Response Network”. Ce n’est pas la première fois que les autorités pakistanaises ont recours au blocage de l’intégralité d’une plate-forme en raison de certains contenus jugés blasphématoires. Facebook et YouTube avaient été bloqués dans le pays à la mi-2010. L’accès à Facebook avait été bloqué du 19 au 31 mai 2010, date à laquelle la Haute Cour de Lahore l’avait à nouveau autorisé, en raison d’un concours de caricatures organisé sur le réseau social et intitulé "La journée des dessins de Mahomet". Un récent projet gouvernemental de filtrage du web avait été dénoncé par des ONG locales et internationales, dont Reporters sans frontières, à l’initiative de Bolo Bhi, association pakistanaise de défense des droits de l’homme.
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Updated on 20.01.2016