Les médias au cœur des violences perpétrées par les militaires place Tahrir au Caire

Reporters sans frontières condamne fermement la répression aveugle qui s’est abattue contre les manifestants de la place Tahrir entre les 16 décembre et 18 décembre 2011, et dénonce une campagne de violences systématiques perpétrées par les militaires contre les professionnels de la presse. Le nombre d’exactions à l’encontre des journalistes ne peut pas être déterminé avec exactitude, tant le chaos qui règne place Tahrir rend difficile l’accès à l’information. Les exactions recensées sont loin d’être exhaustives: Le 17 décembre, le siège temporaire de l’agence de presse Cairo News Company a été la cible d’un raid par des soldats en civil. Alors que l’équipe de l’agence s’était installée au 8ème étage de l’hôtel Ismailiya pour couvrir les événements, une trentaine de soldats ont pénétré dans le bâtiment afin de détruire leur équipement. Les soldats se sont montrés particulièrement violents, jetant des caméras et d’autres appareils par la fenêtre. Selon les sources de la chaîne, si aucune victime n’est à déplorer, les dégâts matériels atteignent presque 100.000 dollars. L’agence avait déjà été ciblée par l’armée en 2008, et pendant le début des manifestations en février 2011. Le journaliste Tom Dale, installé dans le même hôtel avec deux autres collègues, a vu un membre des forces armées pénétrer dans leur chambre et voler deux caméras. Le siège de la chaîne satellite ON TV a été la cible d’un raid des forces armées alors qu’elle diffusait un reportage sur les violences place Tahrir. Plusieurs caméras ont été confisquées. La diffusion des programmes de CBC a été coupée. La chaîne Al-Jazeera a aussi subi le même sort lors de l’irruption dans ses locaux de plusieurs militaires qui ont, en outre, endommagé et détruit des caméras. La responsable de la chaîne a été interpellée pendant deux heures avant d’être relâchée. Les journalistes du quotidien indépendant Al-Masry Al-Youm, Shima Adel et Sara Nureddin ont été interpellées alors qu’elles couvraient les événements place Tahrir. Le rédacteur en chef du site Bikiya Masr, l’Américain Joseph Mayton a été agressé par la police militaire puis interpellé alors qu’il couvrait les manifestations. Il a récemment relaté la torture et les menaces subies pendant sa brève détention aux mains des militaires. Lors des affrontements, le journaliste du quotidien libanais Al-Nahar, Amr Saeed, a été blessé à l’oeil suite à une agression dans la rue Qasr Al-Ayni. Le journaliste et activiste du mouvement du 6 Avril, Hassan Shaheen, a été agressé par des militaires bien qu’il ait présenté son accréditation de journaliste. Il a été blessé au visage et à plusieurs endroits du corps. Le journaliste du quotidien pro-gouvernemental Al-Masaiya, Ashraf Al-Wardani, a été interpellé puis passé a tabac à proximité du Parlement. Un journaliste du site Masrawy, a été interpellé par des militaires pendant cinq heures. Les soldats lui ont en outre confisqué les photos qu’il avait prises. Une équipe de la station de radio France Culture, venue au Caire pour un entretien avec l’écrivain Alaa Al-Aswany et logée à l’hôtel Ismailiya, a été agressée par des baltajiya, milice ralliée au gouvernement. Arrivés à l’hôtel, situé aux abords de la place Tahrir, les journalistes ont commencé à enregistrer les violences de l’armée à l’encontre des manifestants. Une demi heure après, un groupe de personnes les a battus et détruit une partie de leur matériel d’enregistrement. Reporters sans frontières exige des autorités égyptiennes l’arrêt immédiat des violences contre les professionnels de la presse.
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Mise à jour le 25.01.2016