Les journalistes palestiniens font toujours les frais des tensions politiques entre le Hamas et le Fatah

« Les journalistes palestiniens continuent de travailler dans un climat extrêmement pesant. Victimes d’arrestations, d’agressions ou de perquisitions, ils font une nouvelle fois les frais des tensions entre l’Autorité palestinienne et le Hamas. La liberté de la presse est mise à mal au profit de règlements de comptes politiques », a déploré une nouvelle fois Reporters sans frontières. Le 7 mai 2010, les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne ont arrêté le journaliste, Samer Rwayched, correspondant de la station de radio Sawt Al-Aqsa, (affiliée au Hamas), à son domicile à Hebron. Des responsables de la radio contactés par Reporters sans frontières disent ignorer les raisons officielles de cette arrestation et le lieu où le journaliste est actuellement détenu. Le 4 mai 2010, les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne ont arrêté deux journalistes, Mohamed Ezzat Al-Halayka et Sami Asa’d, qui travaillent pour plusieurs sites Internet affiliés au Hamas. Mohamed Ezzat Al-Halayka était chez lui dans le village d’Al-Shouyoukh à Hébron quand les forces de sécurité l’ont arrêté. Sami Asa’d a été quant à lui arrêté alors qu’il rentrait à son domicile, à Bethléem. Le jour même, les forces de sécurité ont arrêté plusieurs personnes considérées comme proches du Hamas à Hébron. Le 1er mai 2010, Muhannad Adnan Aziz Salahat, journaliste et directeur de l’association palestinienne des droits de l’homme (Monitor) en Jordanie, a été arrêté par les services de renseignements palestiniens. Ces derniers avaient envoyé, le 26 avril, une convocation au journaliste, lui demandant de se présenter le 1er mai. Depuis, les services de renseignements refusent de donner des informations sur la détention du journaliste. Muhannad Adnan Aziz Salahat avait déjà été interpellé à deux reprises par les services de renseignements au check-point Al-Karama le 28 mars 2010, alors qu’il rentrait de Jordanie, et le 14 avril 2010. Il a été interdit de quitter les Territoires palestiniens, sans que cette décision s’appuie sur une base légale. Muhannad Adnan Aziz Salahat a écrit plusieurs articles critiquant les arrestations de citoyens palestiniens par l’armée israélienne. Il a récemment réalisé des documentaires diffusés sur la chaîne Al-Jazeera montrant les conditions de vie des Palestiniens de Jérusalem, suite à la destruction de leurs maisons par l’armée israélienne. Ces documentaires ont été considérés, par l’Autorité palestinienne, comme incitant à la violence contre Israël. Le 25 avril 2010 à Gaza, des individus prétendant appartenir au ministère de l’Information du gouvernement du Hamas ont perquisitionné le domicile de la journaliste Noufouz Al-Bakri, correspondante du journal Al-Hayat Al-Jadida. Pour qu’elle puisse continuer ses activités de correspondante, ils ont exigé qu’elle demande une autorisation d’ouvrir un bureau de presse, estimant que le domicile de la journaliste pouvait être qualifié de la sorte. Suite à cette perquisition, la journaliste a contacté des responsables au ministère de l’Information qui ont nié toute relation avec l’incident. Ce n’est pas la première fois que le domicile de Noufouz Al-Bakri est perquisitionné. Le 7 mars dernier déjà, des individus prétendant appartenir aux forces de sécurité du ministère de l’Intérieur du Hamas avaient fouillé son domicile (lire http://fr.rsf.org/territoires-palestiniens-le-jour-meme-de-sa-liberation-les-11-03-2010,36691.html). Le 22 avril 2010, l’équipe de la chaîne satellitaire Al-Jazeera a essuyé des tirs à Ramallah. Des individus armés ont tiré sur la voiture à bord de laquelle se trouvaient le cameraman, le correspondant, l’assistant et le chauffeur de l’équipe. Les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne ont ouvert une enquête sur l’incident. Par ailleurs, Reporters sans frontières a appris que le ministère des Communications et des Technologies de l’information de l’Autorité palestinienne avait annoncé l’interruption de la diffusion des stations de radio et des chaînes de télévision locales de Cisjordanie si elles ne renouvelaient pas leurs licences avant le 15 avril. La Cisjordanie compte au moins 28 chaînes de télévision locales et 27 stations de radio. Le risque est réel que l’Autorité palestinienne se serve de cette disposition pour fermer des médias qui la gêneraient. Le directeur de la chaîne Al-Mahed, seule chaîne chrétienne en Cisjordanie, souligne que le ministère des Communications leur demande des sommes exorbitantes pour le renouvellement des licences. Un autre journaliste témoigne : « Aujourd’hui, seuls les riches peuvent se permettre d’avoir des licences pour des médias, ceci va limiter le pluralisme de l’information en Cisjordanie. Enfin ce n’est qu’un moyen pour limiter la liberté d’expression ». Reporters sans frontières rappelle que les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne ainsi que la Force exécutive du Hamas figurent toujours sur la liste 2010 des prédateurs de la liberté de la presse, publiée le 3 mai dernier.
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Mise à jour le 20.01.2016