Les autorités multiplient les entraves à la liberté de la presse pour sortir le Yémen de l’agenda politique international

“ Comme en Syrie et au Bahreïn, il devient chaque jour plus difficile, pour les médias nationaux et étrangers, de couvrir les mouvements de contestation et leur répression au Yémen. Les violations de la liberté de la presse sont quotidiennes et revêtent des formes variées, complexes et déguisées : enlèvements, tentatives d’assassinat, arrestations, expulsions, saisies de journaux, menaces, attaques contre les locaux de médias, etc. Dans un pays en proie au chaos, le contrôle de l’information est devenu un véritable enjeu pour les autorités. En entravant sa circulation, le gouvernement parvient à faire oublier au reste du monde qu’au Yémen aussi on tue, emprisonne, harcèle les défenseurs de la démocratie. Il est temps que le silence affligeant de la communauté internationale sur la situation au Yémen cesse, et qu’elle prenne enfin ses responsabilités”, a déclaré Jean-François Julliard, secrétaire général de Reporters sans frontières. L’organisation condamne fermement l’arrestation du journaliste néo-zélandais Glen Johnson, le 25 juin 2011 pour “entrée illégale sur le territoire”. Il a été maintenu en détention pendant plus d’une semaine, dans une prison de la province de Lahij (sud de la capitale), avant d’être remis aux forces de sécurité. Il devrait être prochainement expulsé. Sa famille est toujours sans nouvelles de lui. Une page Facebook, intitulée Free Glen Johnson from Yemens jail! (http://www.facebook.com/FreeGlen), a été créée pour demander sa libération. Selon les informations recueillies par l’organisation, ce journaliste freelance, qui collabore occasionnellement avec le New York Times et le International Herald Tribune, travaillait, en plus de sa couverture des manifestations, sur le trafic humain de l’Afrique vers le Moyen-Orient, transitant par le Yémen. Il avait déjà publié quelques articles sur ce sujet. En 2010, alors qu’il réalisait un reportage sur les agressions sexuelles dont sont victimes les femmes dans le pays, les autorités lui avaient donné 72 heures pour quitter le territoire. Par ailleurs, Reporters sans frontières est toujours sans nouvelles du journaliste Yahia Al-Thanaya, correspondant du site d’informations Al-Sahwa.net, enlevé la nuit du 19 juin dernier à un check-point situé à proximité de la base aérienne d’Al-Dailami, à quelques kilomètres de Sanaa. Cet enlèvement est survenu quelques jours après la publication d’un article, par ce journaliste, sur l’existence d’un centre de détention secret installé dans cette base, et où le régime détiendrait, de façon arbitraire, plusieurs militants. En outre, le 25 juin 2011, le journaliste d’opposition Salah Al-Din Al-Dakak a été victime d’une tentative d’assassinat. Des inconnus ont ouvert le feu sur sa voiture, devant l’école de ses enfants, dans la province de Taëz. Le même jour, des exemplaires du journal Al-Oula ont été saisis à l’entrée de Sanaa, pour la 19ème fois depuis le début des manifestations pro-démocratie à la mi-février. Plus récemment, le 30 juin, 2000 copies du journal Al-Umma ont également été confisquées à un check-point à Aden. La saisie de journaux est devenue une méthode de censure fréquemment utilisée par les autorités afin d’entraver la circulation de l’information relative au mouvement de protestation et à sa répression par les forces de l’ordre. De plus, le site internet Mareb Press a été bloqué le 30 juin 2011, et ses journalistes agressés le même jour. Reporters sans frontières rappelle que depuis le début des manifestations demandant le départ du président Ali Abdullah Saleh : - Deux journalistes ont trouvé la mort. Mohamed Yahia Al-Malayia, correspondant du journal Al-Salam a été touché par le tir d’un sniper lors de la répression brutale d’une manifestation, le 18 mars 2011, place du Changement à Sanaa. Le photographe pour le quotidien indépendant Al-Masdar, Jamal Al-Sharabi, a également été touché mortellement lors de cette même manifestation. - Au moins huit journalistes étrangers ont été expulsés. - Au moins six journalistes yéménites ont été kidnappés. - Au moins une cinquantaine d’autres ont été agressés. - La Garde républicaine a saisi des milliers d’exemplaires de quotidiens et hebdomadaires yéménites. - Les sites d’information sont régulièrement bloqué : Al-Masdar Online a été bloqué cinq fois, tout comme Mareb Press. - La chaîne Al-Jazeera a été contrainte de fermer ses bureaux le 25 mars 2011. L’ensemble de ses journalistes ont vu leur accréditation retirée.
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Mise à jour le 20.01.2016