Le Parlement européen demande à la Birmanie de respecter le droit à l’information

Du 10 au 13 juin 2013 s’est tenue à Strasbourg la session plénière du Parlement européen. Un intérêt spécial a été accordé à la situation des Rohingyas en Birmanie, musulmans apatrides persécutés par les autorités, privés d’accès et de diffusion de l’information. “Reporters sans frontières félicite le Parlement européen de s'être prononcé en faveur de l’ouverture aux journalistes des zones sensibles de Birmanie, parmi lesquelles l’Etat de l’Arakan, d’où sont majoritairement originaires les Rohingyas. La désinformation autour des sanglantes émeutes qui ont récemment secoué la Birmanie, en grande partie sous le regard passif des forces de sécurités, doit immédiatement cesser. Elle ne fait qu’aggraver le racisme dont sont victimes les Rohingyas”, a déclaré Reporters sans frontières qui appelle l’Union européenne, lauréate du prix Nobel de la paix 2012, à s’engager à faire respecter par les autorités birmanes les injonctions du Parlement. A l’issue de sa dernière session plénière, le Parlement européen, par le biais de l'article 5, a invité "de nouveau le gouvernement de Birmanie / du Myanmar à accorder aux agences des Nations unies et aux ONG humanitaires, ainsi qu'aux journalistes et aux diplomates, un accès sans entrave à toutes les régions du pays, y compris à l'État de Rakhine, et à permettre à l'aide humanitaire d'atteindre sans restriction toutes les communautés affectées par le conflit et la violence sectaire (...)”. A la fin du mois de mai 2012, et le viol et le meurtre d’une jeune Rakhine (bouddhiste), attribué à trois Rohingyas (musulmans), dont les portraits ont été diffusés sur les réseaux sociaux, de violentes émeutes avaient éclaté en Birmanie. Si la circulation massive de commentaires et d’opinions avait alors démontré l’accroissement de la liberté de l’Internet dans le pays, les mentions récurrentes des origines ethniques de la victime et des suspects avaient immédiatement apposé une grille de lecture biaisée de ce dramatique fait divers. Nombre de journalistes étrangers venus couvrir la crise avaient été soumis à diverses pressions et menaces émanant de la population locale, tandis que le gouvernement a tenté de museler l’information, notamment en ne se prononçant sur ces troubles que cinq jours après que la président Thein Sein a décrété l’Etat d’urgence. Après la publication, le 9 juin 2012, de la photo de la victime du viol par l’hebdomadaire Snapshot (Hlyat Tabyet en birman), la Press Scrutiny and Registration Division avait décidé, le jour même, de suspendre indéfiniment la licence de publication du journal. Propagande indigne Des campagnes de dénigrement, se manifestant par des protestations publiques et des publications en ligne, avaient été lancées à l’encontre de plusieurs médias étrangers. La BBC et la Democratic Voice of Burma avaient notamment été prises à partie, accusées d’apporter une version biaisée du conflit, et le site Internet de cette dernière avait subi de nombreuses attaques. Reporters sans frontières rappelle ses recommandations aux journalistes et acteurs de l’information birmans et étrangers, couvrant directement ou indirectement la question sensible des Rohingyas en Birmanie. En l’absence de cadre légal satisfaisant et offrant une réelle protection à l’ensemble des médias et compte tenu de la polarisation ou de l’inexpérience de certains journalistes : 1) Les rédactions doivent urgemment rappeler les codes éthiques de la profession à leurs journalistes, et mettre en place des réunions spéciales concernant la couverture de la crise. 2) En tenant compte de la diversité des moyens humains et financiers des médias, des formations spéciales et accélérées doivent être organisées afin de préparer les reporters aux problèmes de sécurité que pose la couverture des conflits dans l’Etat d’Arakan. 3) La communauté des médias dans son ensemble doit se rassembler afin d’élaborer des solutions en réponse aux entraves à l’accès à l’information, aux problèmes de sécurité pour les reporters se rendant au plus près des conflits, aux manquements éthiques et à la nécessité pour tous les médias d’appliquer les standards internationaux du journalisme. Lire le rapport spécial : “La crise dans l’Etat d’Arakan et les nouvelles menaces sur la liberté d’information”, publié par Reporters sans frontières le 28 juin 2012. Photo : Soe Than WIN / AFP
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Mise à jour le 20.01.2016