Le gouvernement mis en cause après le limogeage abusif d’un journaliste

De graves soupçons de pressions politiques directes sur une rédaction atteignent le Premier ministre Tillman Thomas (photo) et ses services après le limogeage, le 23 mars 2012, de Rawle Titus, journaliste de l’hebdomadaire Grenada Advocate. Reporters sans frontières attend de franches explications du gouvernement grenadien sur une affaire de nature à compromettre l’indépendance de la profession. “Nous comprenons la très vive émotion manifestée par l’Association des travailleurs de presse de la Grenade (MWAG) depuis que Rawle Titus a reçu notification de la cessation de son contrat au sein de la rédaction de Grenada Advocate. Les éléments portés à notre connaissance sont suffisamment sérieux pour accréditer l’hypothèse d’une ingérence politique directe sur le fonctionnement d’un média réputé indépendant”, a déclaré Reporters sans frontières. “Nous demandons solennellement au Premier ministre Tillman Thomas de désavouer les pressions exercées par ses services sur la direction de Grenada Advocate, et ainsi de renouer avec ses engagements en faveur de la liberté d’informer, exprimés lors de son accession au pouvoir en 2008”, a ajouté l’organisation, qui espère également que les employeurs de Rawle Titus reviendront sur leur décision. Rawle Titus avait signé dans les colonnes de son hebdomadaire, le 9 mars dernier, un article d’après lequel Tillman Thomas aurait procédé à la sélection des candidats aux prochaines élections générales, sans prendre la peine de consulter les cadres de son parti, le Congrès démocratique national (NDC). D’autres médias s’étaient fait l’écho de cette situation. Suite à cette publication, le secrétaire de presse du Premier ministre, Richard Simon, a adressé à deux reprises une demande d’excuse et de rétractation auprès de Grenada Advocate. C’est après réception du second courrier – dont nous avons obtenu copie des principaux extraits - que Rawle Titus s’est vu notifier la fin de son contrat au sein de l’hebdomadaire, à compter du 31 mars prochain. La MWAG nous signale que cet épisode n’est pas le premier du genre. D’après les collègues grenadiens, deux radios ont récemment reçu des avertissements attribués aux services du Premier ministre après avoir informé du présent contexte politique. Malgré une position plutôt favorable (25e) dans le dernier classement mondial de la liberté de la presse, les pays membres de l’Organisation des États de l’Est de la Caraïbe (OECS) font parfois apparaître des cas de pressions politiques directes contre les journalistes ou leurs rédactions. Rarement, pourtant, une affaire de ce type n’avait pris une telle ampleur depuis la mise en faillite, en 2009, de l’hebdomadaire Grenada Today après un procès en “diffamation” perdu contre l’ancien Premier ministre Keith Mitchell.
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Updated on 20.01.2016