Le gouvernement français doit intensifier ses efforts pour obtenir la libération de Pham Minh Hoang

Reporters sans frontières a organisé dans ses bureaux, à Paris, le 14 décembre 2010, une conférence de presse sur le cas de l’universitaire et blogueur franco-vietnamien emprisonné Pham Minh Hoang, en présence de son frère, Duy Khanh Pham, et des membres du parti Viet Tan, dont Binh Nguyen, responsable du parti en Europe, afin de donner des nouvelles récentes du blogueur et d’aborder le rôle de la France dans cette affaire. Arrêté le 13 août 2010, il arrivait ces jours-ci au terme de ses quatre mois de détention. Mais, la famille a appris, le 14 décembre au matin, que les autorités avaient décidé son maintien en prison pour quatre mois supplémentaires pour les “besoins de l’enquête”. La loi vietnamienne permet aux autorités de maintenir les prisonniers politiques quatre mois, renouvelables jusqu’à trois fois sans procès et sans accès à un avocat. Jean-François Julliard, secrétaire général de Reporters sans frontières, a rappelé que “le contexte politique dans le pays est particulièrement tendu à l’approche du Congrès du Parti communiste prévu début 2011”. L’organisation s’inquiète du fait que les dissidents risquent de payer cher les tensions internes au parti. Jean-François Julliard encourage les médias français et internationaux à faire connaître le sort de Pham Minh Hoang et à profiter du prochain congrès, “pour mettre en lumière la situation de la liberté d’expression et des droits de l’homme au Viêt-nam, aujourd’hui la deuxième prison du monde pour les net-citoyens après la Chine”. Reporters sans frontières demande au gouvernement français de se mobiliser davantage pour obtenir la libération de Pham Minh Hoang dans les meilleurs délais. Alors que les militants des droits de l’homme vietnamiens qui bénéficient d’une double nationalité sont généralement libérés et/ou expulsés au bout de quelques semaines au maximum, Pham Minh Hoang a déjà passé quatre mois en prison. La diplomatie australienne avait réussi à faire libérer en une dizaine de jours la militante des droits de l’homme australo-vietnamienne, Vo Hong, membre de Viet Tan, arrêtée après avoir participé à une manifestation contre les prétentions territoriales de la Chine au Viêt-Nam. Bernard Kouchner, l’ancien ministre des Affaires étrangères, avait répondu à un courrier de Reporters sans frontières en septembre dernier, expliquant que le droit de visite consulaire avait été exercé. La famille se voit régulièrement indiquer que “les négociations continuent” sans qu’aucune précision soit donnée ni aucune amélioration constatée. Reporters sans frontières s’inquiète d’un “choix d’en faire peu” de la part de la France, afin de ne pas mettre en danger les relations franco-vietnamiennes. Duy-Khanh Pham rend hommage au courage de sa belle-soeur, Le Thi Kieu Oanh, qu’il présente comme une femme qui, par son courage, “représente la dignité qui a été enlevée à son mari”. Il rappelle que sa belle-soeur n’a pu rencontrer Pham Minh Hoang que lors de deux visites brèves, sous surveillance policière. Duy-Khanh Pham s’inquiète du fait qu’ “il a beaucoup maigri, sa santé s’est beaucoup dégradée, tout comme son état psychologique. Ce n’est plus le même homme, son raisonnement à changé”, en raison de “son isolement physique, mais également médiatique”. Duy-Khanh Pham s’inquiète qu’en le maintenant en détention pendant un an, les autorités ne parviennent à lui arracher des aveux forcés, ou des conditions de libération inacceptables. Le Viet Tan craint également une “condamnation pour l’exemple, pour faire peur, sous de faux motifs”. Duy-Khanh Pham détaille alors les différentes options possibles pour son frère : “Pendant les 4 mois à venir, quatre possibilités sont envisageables : une libération sans charge, un renouvellement de sa detention, une expulsion, ou une convocation au tribunal pour un procès qui peut intervenir à tout moment.” Il rappelle que seule “la famille a un avocat” (et non Pham Minh Hoang en personne) “mais (que) tant que l’enquête n’est pas terminée l’avocat ne peut pas avoir accès au dossier de Pham ni lui rendre visite”. Il ajoute que “la famille souhaite évidemment une libération sans condition. Si Pham préfère rester au Viêt-nam, de son plein grè, après sa libération, la famille respectera son choix, s’il lui est réellement possible de vivre dans de bonnes conditions, avec une vie normale et digne. Si ces conditions ne sont pas respectées, nous préférons qu’il soit expulsé. Les conditions de sa libération sont aussi importantes que sa libération.” Au terme de cette rencontre, Duy-Khanh Pham a rappelé l’importance de la mobilisation internationale, de la médiatisation et de la nécessité de ne pas laisser tomber le cas de son frère dans l’oubli, tout comme celui tous les militants des droits de l’homme détenus dans le pays. Binh Nguyen a expliqué que le Viet Tan a notamment lancé une campagne de sensibilisation à travers le monde. Leur pétition pour la libération de Pham Minh Hoang et d’autres membres de Viet Tan a également récolté 17 000 signatures. Binh Nguyen a fait remarquer que l’importante mobilisation autour des otages français à l’étranger contraste étrangement avec le silence autour du cas du blogueur français. Pham Minh Hoang, âgé de 55 ans, a en effet vécu en France pendant une vingtaine d’années, et y a également effectué ses études. Reporters sans frontières, qui a sollicité un entretien avec la ministre des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, compte ainsi mettre le cas de Pham Minh Hoang en avant auprès de ses interlocuteurs au Quai d’Orsay. L’organisation avait également écrit à la Secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, à l’occasion de sa visite à Hanoï le 30 novembre dernier, lui demandant de faire pression pour obtenir la libération des journalistes et blogueurs emprisonnés (v. article). Un courrier adressé à la Banque mondiale demandait que la question des droits de l’homme et des prisonniers politiques soit prise en compte au cours de la conférence des donateurs à Hanoï, les 7 et 8 décembre dernier. L’organisation a reçu une réponse l’assurant de l’importance, pour la Banque mondiale, des problématiques liées à la liberté d’expression, mais aussi de la poursuite du dialogue constructif avec le Viêt-Nam. Plus d’informations sur l’affaire Pham Minh Hoang et les dernières arrestations : http://fr.rsf.org/vietnam-le-blogueur-franco-vietnamien-pham-30-09-2010,38468.html http://fr.rsf.org/viet-nam-detention-illegale-et-nouvelles-21-10-2010,38632.html
Publié le
Updated on 20.01.2016