Le corps retrouvé n'est pas celui de Guy-André Kieffer

"Nous apportons plus que jamais notre soutien à la famille de Guy-André, à nouveau plongée dans l'incertitude", a déclaré Reporters sans frontières alors que les résultats d'analyses ADN viennent de révéler, le 12 janvier 2012, que les ossements retrouvés la semaine dernière à Issia en Côte d'Ivoire ne sont pas ceux du journaliste franco-canadien Guy-André Kieffer, disparu à Abidjan le 16 avril 2004. "Nous sommes tous, proches, amis et collègues de Guy-André, déterminés à ce que la vérité éclate et que les auteurs de sa disparition soient identifiés puis traduits en justice. Partie civile au dossier, Reporters sans frontières appelle les autorités ivoiriennes et françaises à continuer ce travail de concert et demande au juge Ramaël de poursuivre ses efforts pour que justice soit rendue", a ajouté l'organisation. "Cette nouvelle est un soulagement car elle me pousse à croire que Guy-André pourrait être en vie. Le combat se poursuit car le problème reste entier. Nous ne savons toujours pas ce qui est arrivé à mon mari. Mais je tiens à saluer les efforts constants du juge Ramaël, qui examine sans relâche toutes les pistes qui surgissent dans l'enquête et va jusqu'au bout de chaque nouvel indice", a déclaré son épouse, Osange Silou-Kieffer. "Nous sommes plus mobilisés que jamais par cette annonce et apportons tout notre soutien au juge qui, depuis 2004, fournit des efforts considérables pour faire avancer l'enquête, dans des circonstances souvent difficiles. Petit à petit, nous avançons et nous approchons de la vérité", a ajouté Bernard Kieffer, frère du journaliste. Rappel des faits Le 16 avril 2004, Guy-André Kieffer, journaliste spécialisé dans les matières premières et les questions économiques et financières, a été enlevé par un commando sur le parking d'un supermarché d'Abidjan, alors qu'il avait rendez-vous avec Michel Legré, le beau-frère de Simone Gbagbo. Le reporter enquêtait à l'époque sur un ensemble de malversations dans la filière cacao, dont la Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial. Le 28 avril 2004, la famille du journaliste décide de porter plainte contre X pour enlèvement et séquestration, suivie de Reporters sans frontières quelques jours plus tard. L'enquête instruite par le juge Patrick Ramaël, saisi de l'affaire, s’est longtemps heurtée aux relations tumultueuses entre la France et la Côte d’Ivoire, aux difficultés pour mener des recherches sur place, et à l’omerta qui entourait les protagonistes de l’affaire, tous proches de la Présidence ivoirienne de l’époque. Depuis le changement de pouvoir en avril 2011 en Côte d'Ivoire, le juge a effectué trois voyages sur place. Lors d'un précédent séjour, en novembre 2011, il avait notamment auditionné Patrice Baï, ancien chef de la sécurité rapprochée de Laurent Gbagbo, et le commandant Anselme Séka Yapo, qui assumait la même fonction auprès de Simone Gbagbo, l’épouse de l’ex-président. C'est sur les indications d'un informateur que le juge Ramaël avait ordonné les fouilles qui ont conduit à la découverte d'un corps le 6 janvier 2012. Cette personne affirmait avoir reconnu le journaliste et assisté à son enterrement, en 2004, dans la région. Retour sur huit ans de mobilisation internationale Pendant ces huit dernières années, les proches et les collègues de Guy-André Kieffer n'ont eu de cesse de dénoncer cet enlèvement et l'enlisement de l'enquête. En 2005, pour le premier anniversaire de la disparition du journaliste, une soirée chants et poésie a été organisée à la Chapelle des Lombards. Reporters sans frontières, Osange Silou-Kieffer, l'association "Vérité pour Guy-André Kieffer" et le "comité de soutien breton pour Guy-André Kieffer" sont également venus déverser du cacao liquide et des faux dollars, le 15 avril 2005, devant l’ambassade de Côte d’Ivoire à Paris. Suivront une opération "Que savait Guy-André Kieffer ?" au Salon du chocolat à Paris, le 28 octobre 2006, et une campagne d'affichage sauvage par pochoirs représentant le journaliste, dans différents endroits de Paris dont l'ambassade de Côte d’Ivoire, le 16 avril 2007. De son côté, le Club de la presse de Lyon a organisé depuis 2004 de très nombreuses actions de mobilisation et de soutien en appui aux initiatives de la famille lyonnaise de Guy-André Kieffer (campagnes de presse et d’affichages, concerts de soutien, colloques). Les actions ne se sont pas arrêtées là. A l'occasion du cinquième anniversaire de l’enlèvement du journaliste, sa famille, les comités de soutien et Reporters sans frontières ont organisé une manifestation sur la place de la Bastille à Paris ainsi qu’une soirée "Musique et Poésie" au Cabaret Sauvage. Un an plus tard, le 15 avril 2010, une conférence de presse a été organisée dans les locaux de Reporters sans frontières en présence de la famille et des comités de soutien. Une autre, animée par le collectif ivoirien Vérité Guy-André Kieffer, a lieu à Abidjan, avec le soutien de l’Union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire (UNJCI). A cette occasion, des visuels de 4x3m avec le portrait de Guy-André Kieffer étaient pour la première fois affichés dans les rues et les avenues d’Abidjan. Le lendemain, une soirée chants et poésie était également organisée au musée Dapper à Paris. En 2011 enfin, une grande marche était organisée de la Place de la Bourse au jardin des tuileries, à Paris.
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Updated on 20.01.2016