Le Conseil supérieur de l’audiovisuel turc doit renoncer à son acharnement contre Kanal D

Reporters sans frontières appelle le RTÜK (Conseil supérieur de l’audiovisuel) à abandonner ses poursuites contre Kanal D. La chaîne privée, appartenant au groupe Dogan, et critique à l’égard du gouvernement, risque d’être condamnée à verser une amende allant de 192 000 à 384 000 euros, pour violation de l’alinéa (y) de l’article 4 de la loi 3984 relative aux médias audiovisuels, interdisant de montrer « les caractéristiques effrayantes d’une organisation terroriste ». Le RTÜK reproche aux responsables de Kanal D d’avoir transmis, dans le journal télévisé du 20 et celui du 22 juin 2010, la réaction des familles de dix soldats tués dans une embuscade du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) quelques jours auparavant, non loin de la province de Semdinli au sud-est de la Turquie. Le consensus n’est pas total au sein du RTÜK : deux de ses membres, Hülya Alp et Esat Ciplak, ont exprimé leur désaccord avec les poursuites engagées contre Kanal D. Pour Hülya Alp, point de propagande dans l’émission de la chaîne, mais « une manifestation de la détermination et de l’union du peuple et du soldat turcs dans la défense de la patrie. » L’organisation ne peut que faire corps avec le principal présentateur de la chaîne, Mehmet Ali Birand, qui s’est indigné sur CNN Türk contre les poursuites du RTÜK, estimant qu’il devient impossible de faire du journalisme et que la liberté de la presse est plus que jamais bafouée : « Qu’allons-nous montrer, si nous ne devons pas montrer le malheur des familles qui ont perdu un fils ? Nous ne devons pas tendre le micro à ces gens-là ? Vous voulez que l’on censure ce qu’ils disent ? Que l’on arrête de travailler et que d’autres disent que tout va pour le mieux ? » La Turquie est classée 138e sur 178 au classement mondial de la liberté de la presse 2010, publié le 20 octobre par Reporters sans frontières.
Publié le
Updated on 20.01.2016