Le calvaire des journalistes irakiens

Lire en arabe (بالعربية) Reporters sans frontières condamne les attaques simultanées des sièges de quatre quotidiens irakiens (Al-Nass, Al-Barlaman, Al-Doustour et Al-Moustaqbal Al-Iraqi) à Bagdad, dans la journée du 1er avril 2013. Une cinquantaine d’hommes armés de bâtons et de couteaux ont vandalisé les bureaux des quatre médias. Ils ont saccagé équipement informatique et mobilier avant de s’en prendre violemment aux employés. Six journalistes ont dû être hospitalisés. Les auteurs de ces violences n’ont à ce jour pas pu etre identifiés avec certitude. Les interprétations sont multiples. Pour Bassam Al-Sheikh, rédacteur en chef du journal Al-Doustour, les agresseurs appartiendraient à une milice chiite radicale, dirigée par Mahmoud Al-Hassani Al-Sarkhi. Ce dernier, soupçonné de vouloir mettre la main sur Kerbala, ville sainte chiite, avait été vivement critiqué dans des articles publiés par ces quatre journaux. Selon Ali Al-Darraji, rédacteur en chef d’Al-Moustaqbal Al-Iraqi, interrogé par Reporters sans frontières, cette opération d’intimidation avait pour but de “museler les voix indépendantes”. Ces attaques marquent le point culminant d’une série d’entraves et d’exactions contre les professionnels de l’information. Le ministère de l’Intérieur a certes condamné les actes de violence contre les quatre journaux. Pour autant, Reporters sans frontières s’inquiète de l’absence de mesures concrètes prises par les autorités afin de garantir la protection et la sécurité des journalistes. “Nous dénonçons la recrudescence des exactions visant les journalistes, et le fait que les forces de sécurité irakiennes soient régulièrement impliquées dans les agressions de professionnels de l’information, entravant leur travail”, a déclaré l’organisation. Le lot quotidien de nombreux journalistes irakiens est constitué de menaces, de tentatives de meurtre, d’agressions, de difficultés pour obtenir des autorisations, d’interdictions d’accès, de confiscations du matériel, etc. Le climat est des plus tendus, dans un contexte d’exacerbation des tensions politiques et confessionnelles. D’où la décision des autorités de reporter les élections locales, prévues initialement le 20 avril prochain, d’au moins six mois. La majorité des cas d’exactions recensés sont le fait des forces de sécurité. Au début du mois de mars 2013, les journalistes étrangers ont eu interdiction de se rendre dans la province d’Al-Anbar, où se déroulaient depuis plus de deux mois des manifestations pour réclamer la libération de prisonniers détenus arbitrairement. Le 22 mars, médias locaux et étrangers contraints de quitter le gouvernorat de Tikrit, où des manifestations pour réclamer la libération de prisonniers étaient organisées. Même scénario à Al-Kut le 25 mars, et à Bassorah le 31 mars, où deux cameramen des chaînes satellitaires Al-Ahd et Al-Alam, Abdallah Al-Askari et Mohamed Al-Rasid, ont été molestés par un officier alors qu’ils couvraient des évènements dans la région, suite à un attentat près d’une mosquée qui a fait 25 blessés à Al-Zubayr. D’autres exactions incombent aux milices. Le 3 mars dernier, le journaliste Karar Al-Tamimi (Al-Anbar TV) a été enlevé à Kerbala par les membres d’une milice armée chiite. Il a été retrouvé deux jours plus tard, souffrant de fractures multiples et d’un traumatisme psychologique.
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Updated on 20.01.2016