A l’approche des manifestations du 14 février à Manama, les autorités serrent la vis dans l’indifférence la plus totale

Les autorités bahreïnies continuent de rechigner à accueillir des journalistes étrangers sur leur territoire. Dans un communiqué publié le 8 février dernier, le président de l’Autorité des Affaires de l’Information (AAI) avait justifié ces refus au nom de la sécurité des journalistes et du “nombre anormalement élevé de demandes de visas de médias pour la période du 11 et 18 février”. Reporters sans frontières avait dénoncé ces arguments fallacieux: “Ces refus de visa constituent clairement un élément du dispositif de black-out médiatique mis en place par les autorités à la veille de l’anniversaire du soulèvement, afin de limiter le nombre de témoins gênants des manifestations à venir et de leur probable répression”, avait déclaré l’organisation. Au cours du week-end, alors que les manifestations prenaient de l’ampleur, plusieurs journalistes étrangers ont été refoulés à leur arrivée à l’aéroport, alors même qu’ils avaient obtenu les autorisations nécessaires. Le 11 février dernier, à son arrivée à l’aéroport, une équipe de la télévision japonaise NHK s’est vu interdire l’entrée dans le pays, alors même qu’elle avait reçu les autorisations de l’Information Affairs Authority (IAA). Et d’après le Bahrain Youth Society for Human Rights, un journaliste australien se serait également vu interdire la possibilité d’entrer au Bahreïn, avant d’être remis dans un avion. Par ailleurs, un nouveau site Internet Witness Bahrain, lancé le 10 février dernier, en vue de publier les informations relatives aux violations des droits de l’homme au Bahreïn, a été bloqué au lendemain de son lancement. Deux militantes de nationalité américaine, Radhika Sainath et Huwaida Arraf, en charge d’alimenter le site en vidéos, ont été arrêtées le 11 février alors qu’elles filmaient une manifestation pacifique dans la capitale. Elles ont été expulsées quelques heures plus tard, en direction des Etats-Unis. Reporters sans frontières considère le traitement réservé aux collaborateurs de ce site comme une preuve supplémentaire que, contrairement à ce qu’elles prétendent, les autorités cherchent à étouffer à tout prix la couverture des violations des droits de l’homme dans le pays. Ce blocage vient allonger la liste des sites d’information indépendants bloqués, et notamment des sites de streaming, utilisés par les militants pour transmettre en temps réel des images des manifestations et de leur répression. --------- 10.02.2012 - A la veille du premier anniversaire du soulèvement au Bahreïn, des journalistes étrangers sont privés de visa A l’approche du premier anniversaire du soulèvement populaire au Royaume du Bahreïn, le 14 février prochain, Reporters sans frontières a recensé un certain nombre d’atteintes à la liberté d’informer.
Les autorités bahreïnies semblent rechigner à accueillir des journalistes étrangers sur son territoire alors que des manifestations sont prévues à l’occasion du premier anniversaire du soulèvement. Privés de visas, les ces reporters étrangers sont empêchés de se rendre au Bahreïn.
Dans un communiqué publié le 8 février 2012, le président de l’AAI (Autorité des Affaires de l’Information), Cheikh Fawaz Ben Mohammed Al-Khalifa, a justifié ces refus au nom de la sécurité des journalistes et du “nombre anormalement élevé de demandes de visas de médias pour la période du 11 et 18 février”.
Reporters sans frontières dénonce les arguments fallacieux mis en avant par les autorités du Royaume. Tout le monde se rappelle qu’au cours du soulèvement, des journalistes étrangers ont été directement et délibérément agressés, attaqués par les forces de sécurité. Certains ont même été la cible de tirs alors qu’ils couvraient les manifestations sur la Place de la Perle. Ces refus de visa constituent clairement un élément du dispositif de black-out médiatique mis en place par les autorités à la veille de l’anniversaire du soulèvement, afin de limiter le nombre de témoins gênants des manifestations à venir et de leur probable répression.
D’après les informations recueillies, voici la liste non exhaustive des journalistes qui se sont vu refuser un visa:
Nicholas Kristof, journaliste pour The New York Times. Présent en décembre 2011, il a été victime d’une agression au gaz lacrymogène et a été brièvement interpellé par les forces de sécurité. Les autorités avaient vivement critiqué sa couverture des événements au Bahreïn.
Adam B. Ellick, photojournaliste du New York Times, s’est quant à lui vu recommander de renouveler sa demande après février. Avec son confrère Nicholas Kristof, il avait également été interpellé après avoir essuyé des tirs de gaz lacrymogènes.
Kristen Chick, qui travaille pour The Christian Sciences Monitor, et Cara Swift de la BBC ont également été privées de visa au motif d’un “fort afflux de demandes”.
Alex Delmar-Morgan du quotidien américain The Wall Street Journal, arrêté en mars 2011 par la Garde nationale, et le journaliste Gregg Carlstrom d’Al-Jazeera ont également essuyé des refus.
Par ailleurs, plusieurs journalistes et activistes bahreïnis font l’objet de poursuites judiciaires ou ont été condamnés à de lourdes peines.
Le journaliste Waheed Al-Balloushy a été déféré en justice après avoir “tweeté” un message considéré comme “insultant” et “portant atteinte” à l’intégrité du Prophète Mohammed. Suite au dépôt d’une plainte des membres de l’organisation salafiste Al-Asala Islamia Society, les autorités l’ont convoqué, le 2 février dernier, dans le cadre d’une procédure judiciaire. Waheed Alballoushy s’est dit la cible d’une “revanche politique”.
La journaliste Reem Khalifa est, quant à elle, toujours inquiétée par les autorités après avoir engagée une action en justice contre ses agresseurs pro-gouvernementaux qui l’ont violemment battue et insultée en février 2011. Son procès a été ajourné le 2 février dernier et reporté au 23 février prochain. Reporters sans frontières s’alarme également des vagues de blocages de sites d’information indépendants, et notamment des sites de streaming. Toujours soucieux d’éviter toute couverture médiatique des mouvements de contestation, le régime a rendu inaccessibles plusieurs sites diffusant des informations sur les soulèvements populaires en direct. Le 4 février 2012, le site live973.info, qui diffusait en direct des images d’une manifestation de groupes de l’opposition, a été bloqué, ainsi que la page “Wefaq live” du site de streaming audio mixlr.com. Un message stipulait que ces sites avaient été “bloqués pour violation des lois et règles du Royaume du Bahreïn”, deux heures après le début du rassemblement qu’ils couvraient, et qui avait pourtant été autorisé par le ministère de l’Intérieur. Le 7 février, les autorités ont également bloqué l’accès à la nouvelle page du site mixlr.com, “Square freedom”.
L’an dernier déjà, les autorités avaient bloqué des sites d’information en temps réel qui retransmettaient des images de manifestations.
Le Bahreïn fait partie des “Pays sous surveillance” dans la liste des ennemis d’Internet établie par Reporters sans frontières. Le Royaume du Bahreïn a chuté dans les profondeurs du classement mondial de la liberté de la presse 2011-2012. Il perd 29 places, et se situe désormais au 173ème rang sur 178 pays.
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Updated on 20.01.2016