La loi sur l’Information secrète compromet gravement le droit des citoyens à être informés

Imprécise, discrétionnaire et votée à la hâte, la loi sur les secrets officiels et la déclassification de l’information publique, adoptée au Congrès le 13 janvier 2014, constitue une nouvelle défaite pour la liberté de l’information dans un pays où celle-ci subit déjà les pires entraves. Reporters sans frontières espère qu’un recours en inconstitutionnalité rendra caduque une législation qui convertit l’information publique en véritable chasse gardée. “La nouvelle loi retire purement et simplement à l’Institut d’accès à l’information publique (IAIP) la prérogative qui constitue sa raison d’être : celle de déterminer et de justifier la classification de certaines données d’intérêt public. Cette compétence est désormais confiée sans plus de critère à chaque administration d’État, qui pourra donc imposer le secret sans avoir à rendre de comptes”, estime Reporters sans frontières. “Nous ne pouvons que relayer les objections soulevées contre cette loi par la présidente de l’IAIP Doris Madrid. De quelle latitude disposeront désormais les citoyens pour interroger le fonctionnement et les décisions des pouvoirs publics ? Au nom de quel impératif précis une information sera déclarée ‘réservée’ selon les termes de la nouvelle loi ? Les conditions mêmes d’adoption du texte posent question. Dangereuse dans son contenu, contraire aux jurisprudences internationales et notamment à la Convention américaine des droits de l’homme, l’initiative parlementaire est politiquement désastreuse deux mois à peine après la dernière séquence électorale controversée”, ajoute l’organisation. Introduite au Congrès par le député du Parti national (droite conservatrice) Rodolfo Zelaya et adoptée dans la foulée presque sans débat, la législation dispose en particulier que : “Est dite réservée, toute information, documentation ou matière relative au cadre stratégique interne des entités de l’État et dont la révélation pourrait produire des effets institutionnels indésirables si elle était publiquement disponible, à l’encontre du développement effectif des politiques de l’État ou du fonctionnement normal des institutions du secteur public. Cette classification est la faculté propre du représentant de chaque entité de l’État.” Valable pour une durée de cinq ans, le caractère “réservé” d’une information pourra être décrété unilatéralement par les institutions centralisées ou décentralisées. La même faculté leur est octroyée de déclarer une information “confidentielle”, cette fois pour une durée de dix ans, en cas de “risque imminent ou menace directe contre la sécurité et l’ordre publics”. Une troisième catégorie, dite “secrète” relève, quant à elle, du Conseil national de défense et de sécurité pour une durée de quinze ans, notamment en cas d’atteinte possible à “l’ordre constitutionnel”. La catégorie “ultrasecrète” émane, enfin, du président de la République en personne pour un délai de vingt-cinq ans en cas de “menace directe contre l’intégrité territoriale et la souveraineté”. Pays parmi les plus meurtriers du continent pour les journalistes, le Honduras compte 38 tués en une décennie dont les deux tiers depuis le coup d’État du 28 juin 2009.
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Mise à jour le 20.01.2016