La justice abandonne les poursuites pour “faux témoignage” contre la journaliste Ibéyise Pacheco

Reporters sans frontières se réjouit des libérations d'Ibéyise Pacheco, du quotidien El Nacional, le 21 mars 2006 et de Gustavo Azócar Alcalá (photo), de la chaîne Televisora del Táchira, le 22 mars. Ces deux libérations doivent susciter une concertation entre le gouvernement et la presse privée à propos de la loi de responsabilité sociale des médias audiovisuels et de la loi de réforme du code pénal.

Le Tribunal suprême de justice du Venezuela a décidé, le 4 avril 2006, d'abandonner les charges de “faux témoignage“ retenues contre Ibéyise Pachaco, chroniqueuse pour El Nacional et virulente opposante au gouvernement d'Hugo Chávez. En 2004, le procureur Didier Rojas avait porté plainte contre la journaliste, suite à la publication, dans le quotidien El Nacional, d'un article dénonçant “un complot planifié au palais présidentiel“ contre des opposants au président Hugo Chávez. La décision prise par le juge en charge de l'affaire, Eladio Aponte Aponte, a considéré que les droits de la défense n'avaient pas été respectés lors des audiences préliminaires. Reporters sans frontières prend acte de cette décision avec satisfaction, étant donné le climat de tension et d'hostilité qui marque, actuellement, les relations entre le gouvernement et les médias privés. Cette décision représente peut-être une opportunité à saisir pour relancer une réflexion concertée sur le droit de la presse dans le pays. _____________________________________________________________________ 23.03.06 - Libération de deux journalistes : le moment opportun pour réexaminer les lois sur la presse
Reporters sans frontières se réjouit de la levée, le 21 mars 2006, de l'assignation à résidence d'Ibéyise Pacheco, du quotidien El Nacional, et de la remise en liberté de Gustavo Azócar Alcalá, présentateur du programme « Café con Azocar » pour la chaîne Televisora del Táchira et correspondant du quotidien El Universal, incarcéré près de San Cristobál (Etat de Táchira, Ouest) depuis le 7 mars dernier. « Nous accueillons avec satisfaction l'élargissement d'Ibéyise Pacheco et de Gustavo Azócar Alcalá, même si les deux journalistes sont toujours en attente de jugement. Nous espérons que ces libérations contribueront à apaiser le climat délétère qui oppose le gouvernement et les médias privés. Elles doivent surtout créer l'occasion, pour l'un et l'autre, d'un réexamen concerté de la loi de responsabilité sociale des médias audiovisuels et de la loi de réforme du code pénal dont un certain nombre de dispositions sont attentatoires à la liberté de la presse. Ce débat doit avoir lieu, d'autant que le procureur général de la République a lui-même saisi le Tribunal supérieur de justice de l'inconstitutionnalité de 25 articles du nouveau code pénal », a déclaré Reporters sans frontières. Le colonel Angel Bellorín a porté plainte à deux reprises contre Ibéyise Pacheco, virulente opposante au gouvernement d'Hugo Chávez : une première fois pour « diffamation et calomnie », une autre pour « diffamation aggravée ». Dans sa chronique pour El Nacional, la journaliste avait écrit que l'officier s'était prévalu de faux diplômes pour obtenir un titre d'avocat. Une peine de neuf mois de prison avait été prononcée contre Ibéyise Pacheco qui a finalement été assignée à domicile le 15 mars 2006, mais autorisée à continuer son travail. Le 21 mars 2006, la journaliste a été libérée. Concernant la première plainte pour « diffamation », la journaliste a reconnu ses torts devant le plaignant. Selon l'article 492 du code pénal, le pardon du plaignant annule la peine encourue. La plainte pour « diffamation aggravée » a, quant à elle, été abandonnée après la conclusion d'un arrangement entre les deux parties. Cependant, Ibéyise Pacheco est toujours concernée par un autre procès. Elle a comparu devant le Tribunal 12 de contrôle de Caracas, le 14 janvier, pour « faux témoignage » suite à l'accusation formulée, en 2004, par le procureur Didier Rojas. Dans sa colonne « En Privado » du quotidien El Nacional, la journaliste avait affirmé, le 9 mai 2003, que l'enlèvement et l'exécution d'opposants au président Hugo Chávez avaient été planifiés au palais présidentiel de Miraflores. Le procès n'est pas clos. Gustavo Azócar Alcalá a été mis en examen pour « détournement de fonds publics » et « escroquerie » suite à une plainte déposée par Ronald Blanco La Cruz, gouverneur de l'Etat de Táchira. Incarcéré au centre pénitencier de Santa Ana, près de San Cristobál, il devait y rester pendant toute la durée de l'enquête. Le juge en charge de l'affaire, qui avait ordonné la mise en détention préventive du journaliste, a finalement estimé cette incarcération inopportune. La défense a, par ailleurs, fait appel. Gustavo Azócar Alcalá a été relâché à l'issue d'une audience spéciale le 22 mars. Malgré ces deux nouvelles encourageantes, les deux lois dites de « responsabilité sociale des médias audiovisuels », adoptée le 24 novembre 2004, et de « réforme du code pénal », en vigueur depuis le 16 mars 2005 (cf. nos précédents communiqués), continuent de générer un climat extrêmement tendu entre le gouvernement et la presse privée. Estimant que la loi de responsabilité sociale « favorise l'autocensure », le directeur de la chaîne Globovisión, Federico Ravell, a saisi, le 21 mars 2006, le Tribunal supérieur de justice (TSJ) pour obtenir son annulation. Concernant la loi de réforme du code pénal, le TSJ a été saisi, le 22 novembre 2005, d'un autre recours en annulation, émanant cette fois du gouvernement lui-même, formulé par le procureur général de la République, Isaías Rodríguez. Selon ce dernier, qui jugeait « excessivement punitives » les dispositions du nouveau code pénal au moment de son adoption, 25 de ses 546 articles sont inconstitutionnels, en particulier ceux relatifs au délit d' « outrage ». La chambre constitutionnelle a accepté d'apporter des modifications de forme aux articles incriminés. Elle ne s'est pas encore prononcée sur le fond.
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Updated on 20.01.2016