La journaliste et défenseur des droits humains Sanjuana Martínez victime d’abus de pouvoir

Le scandale s’ajoute à la surprise après l’arrestation, le 5 juillet 2012 à Monterrey (Nuevo León) de Sanjuana Martínez, collaboratrice du quotidien La Jornada, réputée pour son combat en faveur de la cause des femmes et des enfants victimes de maltraitance. Officiellement, cette détention s’inscrivait dans le cours de la procédure de divorce opposant la journaliste à son ancien mari, le juge espagnol Carlos Castresana. La journaliste a finalement été remise en liberté dans l'après-midi du 7 juillet. Contactée par Reporters sans frontières, son avocate, Queeney Rose Osorio, a dénoncé "un cas totalement anormal, qui va bien au-delà d'une simple procédure légale et administrative”. “Qui peut croire sérieusement qu’une procédure civile (et en aucun cas pénale) puisse justifier que trois policiers emmènent Sanjuana Martínez en cellule comme une délinquante ? Le prétexte est si peu crédible et fallacieux qu’il traduit au ‘mieux’ une vengeance personnelle de la juge à l’origine de cette mesure, avec qui la journaliste traîne un lourd contentieux, au pire une volonté de punir Sanjuana Martínez pour ses engagements et ses prises de position. Cette affaire tombe au plus mal alors que la crise postélectorale qui agite le pays pose la question du respect réel des libertés publiques et des droits constitutionnels fondamentaux”, a déclaré Reporters sans frontières. Le premier scandale suscité par cette affaire tient, bien sûr, à l’arrestation elle-même, dont les policiers n’ont jamais notifié à l’intéressée les raisons et les documents judiciaires ad hoc. Ce n’est que plus tard, une fois Sanjuana Martínez placée en détention, que son avocate a reçu copie de l’ordre d’appréhension émis par la juge Luz María Guerrero Delgado. L’autre scandale réside dans le motif invoquée par la magistrate : l’instance de divorce entre la journaliste et son ancien mari, qui lui réclame la garde de leurs enfants. La même juge avait déjà menacé Sanjuana Martínez de la priver de ses droits parentaux. En réalité, un conflit entre les deux femmes perdure depuis que Sanjuana Martínez avait dénoncé une perquisition musclée, en septembre 2008, au sein de l’ONG de défense des droits des femmes “Alternativas Pacíficas”, à l’issue de laquelle deux mineurs avaient été arrachés à leur mère, victime de violence conjugale, au bénéfice de leur père. L’opération policière ordonnée par la juge Guerrero Delgado s’était également soldée par l’arrestation de María del Mar Álvarez Morales, directrice de l’ONG. Femme de combat, militante, Sanjuana Martínez a, dès le 2 juillet dernier, donné de la voix quant aux graves allégations de fraude affectant le scrutin fédéral de la veille. Sans établir de lien entre cet éditorial et la présente affaire, Reporters sans frontières ne peut ignorer les conséquences de la crise politique en cours sur la liberté d’information et d’expression. Les intimidations et menaces se poursuivent contre ceux qui la dénoncent.
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Mise à jour le 20.01.2016