La chaîne privée Globovisión sous le coup d'une procédure administrative à la demande du président Hugo Chávez

Reporters sans frontières dénonce la totale irrégularité juridique et l'objectif purement politicien de la procédure administrative ouverte, le 27 novembre 2008, contre la chaîne privée d'informations Globovisión pour “infraction à la loi électorale”. Cette manœuvre démontre avant tout la claire volonté du pouvoir de priver de licence d'émission un média depuis longtemps dans son collimateur. “En répercutant le discours d'un candidat s'autoproclamant vainqueur, Globovisión n'a en rien anticipé le résultat d'un vote, mais fait son travail d'information. Le Conseil national électoral (CNE) a même démenti l'existence d'une 'infraction'. Comment se fait-il que les autres médias susceptibles d'avoir tourné les mêmes images ne soient pas inquiétés ? Tout est, bon semble-t-il, pour retirer sa licence à une chaîne connue pour sa posture critique vis-à-vis du gouvernement d'Hugo Chávez. Le chef de l'État devrait pourtant se souvenir du mauvais précédent de RCTV”, a déclaré Reporters sans frontières. Se conformant aux exigences du président Hugo Chávez, la Commission nationale de télécommunications (Conatel) a notifié, le 27 novembre, à la chaîne de télévision privée Globovisión l'ouverture d'une procédure administrative à son encontre pour violation de la loi électorale, qui interdit à tous les médias de diffuser les résultats des élections avant la publication du bulletin officiel du CNE. Ce mécanisme pourrait impliquer une première sanction interdisant la diffusion des programmes pour une période pouvant aller jusqu'à 72 heures. Selon la Loi de responsabilité sociale de radio et télévision (loi Resort, adoptée en 2004), de cette première condamnation pourrait découler une révocation immédiate de la licence de diffusion de la chaîne - qui expire normalement en 2013 - si cette dernière se rendait responsable d'une autre infraction. Le 24 novembre 2008, à minuit, le CNE a proclamé les résultats des élections régionales, sauf dans les États de Carabobo et de Táchira (Ouest), qui venaient d'élire comme gouverneurs respectifs les candidats d'opposition Henrique Salas Feo et César Pérez Vivas. Globovisión avait alors, comme d'autres médias, diffusé, très tard dans la nuit, la déclaration publique d'Henrique Salas Feo s'autoproclamant vainqueur du scrutin dans son État. Ces résultats ont été confirmés dans la matinée du lendemain par le CNE. En amont des élections, le président avait averti qu'il retirerait les licences des radios et des chaînes de télévision - publiques comprises - qui diffuseraient à l'avance les résultats du scrutin. Au lendemain des élections, le 24 novembre, le chef de l'État a annoncé avoir donné des instructions à la Conatel concernant une “chaîne privée” dont il n'a, sur le moment, pas mentionné le nom. Selon l'avocate de la chaîne, la Conatel n'a pas mandat pour sanctionner un média après une fraude relative à la couverture des élections. C'est au CNE qu'appartient cette prérogative, et l'un de ses représentants a lui même mis en cause l'existence de la “fraude”. Vicente Díaz a, en effet, rappelé que l'interdiction formelle faite aux médias d'annoncer les résultats d'un scrutin étaient uniquement applicables jusqu'à la publication du premier bulletin officiel. Globovisión a respecté ce principe, en diffusant les déclarations d'Henrique Salas Feo deux heures après la proclamation officielle des résultats. Globovisión fait, par ailleurs, l'objet d'une autre procédure administrative en raison de récentes déclarations, au cours de l'émission “Aló Ciudadano” du 13 octobre, du dirigeant d'opposition Rafael Poleo, qui avait déclaré que Hugo Chávez pourrait “finir comme Mussolini”. Ce propos lui avait valu un rappel à l'ordre du présentateur du programme, Leopoldo Castillo. Le gouvernement avait aussitôt dénoncé “un plan pour assassiner le chef de l'État”. La loi Resort établit pourtant que dans le cas de “programmes indépendants” comme “Aló Ciudadano”, le média n'est pas responsable des contenus diffusés (article 28). Chaîne d'informations, et seule hertzienne à adopter un ton critique vis-à-vis du gouvernement d'Hugo Chávez, Globovisión n'a jamais pu obtenir une diffusion au-delà de la conurbation de Caracas. Le siège de la chaîne a récemment essuyé les attaques de certains groupes militants radicaux se réclamant du pouvoir bolivarien. Son directeur, Alberto Federico Ravell, a régulièrement été désigné à la vindicte par le gouvernement comme “conspirateur” contre le chef de l'État.
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Updated on 20.01.2016