Interrogations autour du licenciement de Carmen Aristegui

Après la diffusion d’informations erronées selon lesquelles Reporters sans frontières (RSF) estimait que le licenciement de Carmen Aristegui ne relevait pas d’une problématique liée à la liberté d’expression, l’organisation souhaite préciser sa position et regrette l’instrumentalisation de ces informations pour minimiser l’impact de ce licenciement. RSF s’inquiète de la décision du conglomérat MVS de congédier la journaliste et ses collaborateurs dans un contexte sensible pour la liberté d’expression au Mexique. Le différend entre Carmen Aristegui et la société MVS remonte au 11 mars dernier quand le logo de MVS s’est retrouvé sur le site de MexicoLeaks après que la journaliste a annoncé que MVS participera au projet de la plateforme indépendante. MVS a immédiatement réagi par médias interposés en dénonçant l’utilisation abusive de sa marque, et annoncé des “mesures appropriées”. Le lendemain, Daniel Lizarra et Irving Huerta, deux journalistes de l’équipe de Carmen Aristegui étaient licenciés. Ils faisaient partie de l’équipe, qui, en novembre dernier, avait révélé l'existence d'une résidence présidentielle de luxe, connue comme “la maison blanche". Le 15 mars, la journaliste était à son tour congédiée. L’entreprise MVS Radio de Joaquín Vargas a publiquement déclaré refuser son ultimatum : la réintégration de ses collègues comme condition de poursuite de son programme; et décidé de la licencier. “Le licenciement sans appel de Carmen Aristegui et de ses collègues, la confrontation médiatique choisie par la société MVS et leur décision de ne pas accepter une médiation sont des faits inquiétants pour la liberté d’expression et le droit à l’information dans un contexte déjà extrêmement difficile et tendu pour les journalistes mexicains, déclare Reporters sans frontières. Au vu du travail d’investigation très critique à l’encontre du pouvoir de la journaliste, on ne peut que s’interroger sur les véritables raisons qui se cachent derrière le licenciement. ” Le 19 mars, lors d’une conférence de presse sur Internet, Carmen Aristegui a affirmé à propos de son licenciement qu’il était “clair qu’il ne s’agit pas d’une question entre individus", comme l'a affirmé le ministère de l'Intérieur, mais que cette décision a des ramifications obscures : "la séquence des faits indique que cette décision était préméditée (...) MéxicoLeaks et (l’utilisation abusive) de la marque (MVS) n’ont servi que de prétexte”. Dans une interview accordée à la revue Proceso le 22 mars, elle explique n’avoir aucun doute sur le fait que les pressions présidentielles sont en toile de fond de son licenciement. Elle raconte que la présidence de la République avait fait pression sur MVS pour demander à ce que son reportage ne soit pas diffusé dans l’émission populaire, Noticias MVS le 9 novembre 2014. Le Mexique se situe à la 148ème place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières, publié en février 2015.
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Mise à jour le 20.01.2016