Harcèlement judiciaire d’un journaliste de renom

Le 1er avril 2010, un tribunal a condamné l’écrivain et journaliste Mohammed Abdel Qader Al-Jassem à six mois de prison ferme pour “calomnie“ à l’encontre du Premier ministre, Sheikh Nasser Mohammed Al-Ahmed Al-Sabah. Au cours de réunions publiques, il avait demandé la démission du Premier ministre, estimant qu’il n’était pas capable de gérer les affaires du pays. Le tribunal a toutefois assorti le jugement d’une clause suspensive jusqu’au procès en appel, fixant la caution à 5 000 dinars (environ 13 000 euros). Le journaliste, qui a payé la caution, a exprimé son intention de faire appel de cette condamnation. Le 4 mars dernier, le tribunal avait examiné cette plainte, avant de demander son report. « C’est clairement un jugement politique », a déclaré Mohammed Abdel Qader Al-Jassem à Reporters sans frontières. Le Premier ministre n’en est pas à un coup d’essai. Le journaliste est actuellement la cible de cinq plaintes déposées soit par le Premier ministre, soit par le ministre de l’Information. Le 7 mars 2010, un tribunal koweïtien a condamné un journaliste à payer une amende de 3 000 dinars (environ 7 000 euros), suite à un article publié le 16 août 2009 dans Alam Al-Youm. Dans cet article, le journaliste estimait que les médias qui soutenaient le Premier ministre alimentaient la tension entre les communautés sunnites et chiites de l’émirat. Le Premier ministre avait alors déposé plainte. Refusant de payer la caution, Mohammed Abdel Qader Al-Jassem avait été placé en détention le 23 novembre 2009, avant d’être libéré douze jours plus tard, après avoir finalement consenti à payer la somme de 1 000 dinars (environ 2 300 euros) (Cf : http://www.rsf.org/30-000-euros-d-amende-pour-un.html). Le journal Alam Al-Youm, dans lequel l’article avait été publié, a été condamné à une amende d’un même montant. Par ailleurs, Mohammed Abdel Qader Al-Jassem a déclaré à Reporters sans frontières avoir reçu indirectement, il y a une dizaine de jours, une lettre du directeur de la Sécurité nationale lui enjoignant de quitter le pays. Le journaliste a refusé de s’y soumettre, dénonçant cette injonction sur son blog “aljasem.org”. « J’attends qu’on me convoque pour cette affaire-là », a-t-il conclu ironiquement. « La multiplication des plaintes et des condamnations à l’encontre du journaliste Mohammed Abdel Qader Al-Jassem s’apparente à un véritable harcèlement. Une telle dérive est pour le moins inquiétante », a déclaré Reporters sans frontières.
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Mise à jour le 20.01.2016