Etats-Unis - Journaliste arrêté en Virginie-Occidentale : RSF écrit aux forces de l’ordre

Dans une lettre signée par une coalition d’ONG, Reporters sans frontières (RSF) s’adresse à la police du Capitole de l'État de Virginie-Occidentale au sujet de l’arrestation, la semaine dernière, du journaliste Dan Heyman. Ce dernier avait posé une question au secrétaire d'État américain à la Santé, Tom Price.

Le 16 mai 2017,

Kevin Foreman

[email protected]

Directeur, Services de protection

Département des Affaires militaires et de la Sécurité publique de Virginie-Occidentale

1900 Kanawha Blvd., E.

Building 1, Room W-400

Charleston, WV 25305


Re: Arrestation du journaliste Dan Heyman


Cher M. Foreman,


Reporters sans frontières ainsi que les associations de médias signataires de ce courrier sont très préoccupés par l’arrestation, le 9 mai, du journaliste Dan Heyman par la police du Capitole de l'État de Virginie-Occidentale.


Selon les éléments dont nous disposons, Dan Heyman, journaliste depuis 30 ans, qui travaille depuis 2009 pour Public News Service, a approché le secrétaire d'État américain à la Santé et aux Services sociaux, Tom Price, au Capitole pour lui poser une question. Il portait son badge presse en évidence et avait passé les contrôles de sécurité en entrant dans le bâtiment. N’obtenant pas de réponse, Dan Heyman a répété plusieurs fois sa question, en tenant son téléphone à proximité de Tom Price pour l’enregistrer. Moins d’une minute plus tard, la police du Capitole l’a arrêté pour "perturbation volontaire du travail du gouvernement fédéral".


Si plusieurs versions des faits s’opposent, il apparaît évident que l’arrestation de ce journaliste n’était aucunement justifiée. Dan Heyman était identifié en tant que journaliste et posait des questions à un agent de l'État dans le cadre de son travail. La plainte n’indique par ailleurs pas le moindre comportement menaçant ou suspicieux de sa part. Il couvrait simplement un événement médiatique et n’interférait pas dans le fonctionnement du gouvernement.


Dan Heyman a été arrêté car il aurait enfreint, selon les officiers de police, un article de loi en vigueur en Virginie-Occidentale, selon lequel une amende peut être adressée si une personne “interrompt ou perturbe violemment le calme et l’ordre du processus” gouvernemental. Mais ce texte souligne également l’importance de respecter le Premier amendement, il est ainsi indiqué que “tout rassemblement pacifique, légal et ordonné dans le but d’obtenir la réparation de torts ne saurait constituer une violation de cet article” (W.Va. Code § 61-6-19).


Selon cet article de loi, les activités sécurisées ne devraient donc pas pouvoir faire l’objet d’arrestations, d’autant plus lorsqu’elles n’interrompent en aucun cas le travail du gouvernement. Bien que la loi fasse état de “rassemblements” visant à réclamer “la réparation de torts”, la même protection devrait être mise en place pour ceux dont la mission consiste à informer la population sur des sujets cruciaux. Nous exhortons donc les forces de police à respecter le Premier amendement lorsque des journalistes effectuent leur travail sans porter atteinte à l’intégrité physique de quiconque.


Lorsqu’un journaliste collecte des informations, la police du Capitole se doit de comprendre que les droits relatifs au Premier amendement sont en jeu, comme le mentionne la loi de l'État de Virginie-Occidentale, et qu’il en va également de l’intérêt général, tant le travail effectué par les reporters comme Dan Heyman est important. Si un journaliste parle trop fort, il suffit de lui indiquer de baisser la voix. Si une personne clairement identifiable comme étant journaliste enfreint une ligne de sécurité, elle peut être contenue ou déplacée sans que sa capacité à couvrir l'événement médiatique soit altérée. Le recours à l’arrestation se justifierait uniquement dans le cas où le journaliste menacerait ouvertement l’intégrité physique d’une personne. Nous vous rappelons par ailleurs que le fait de pointer un enregistreur en direction de quelqu’un ne saurait être vu comme une pratique menaçante de la part des journalistes et qu’il s’agit d’une méthode habituelle.


Nous sommes disposés à travailler avec vous sur des méthodes de formation afin que, à l’avenir, officiers de police et journalistes puissent prendre en compte les besoins de chacun.


Cordialement,


Reporters Committee for Freedom of the Press

Comité pour la Protection des Journalistes

Freedom of the Press Foundation

The NewsGuild-CWA

Online News Association

Reporters sans frontières

Société des journalistes professionnels


Image credit: MANDEL NGAN / AFP

Publié le
Updated on 16.05.2017