Élections législatives au Royaume-Uni : la liberté de la presse n’a pas le vent en poupe dans les programmes politiques

Dans la course aux élections anticipées du 8 juin 2017 au Royaume-Uni, les partis politiques ont présenté leurs programmes électoraux. Reporters Sans frontières (RSF) a analysé les dispositions relatives à la liberté de la presse dans les programmes des partis conservateurs, travailliste et libéral-démocrate.

Les conservateurs, qui ont lancé leur programme le 18 mai, se sont engagés à ne pas entamer la mise en œuvre de la seconde étape de la Leveson Inquiry et à révoquer la Section 40 de la Crime and Courts Act 2013 – deux mesures pour lesquelles RSF a militées. RSF et d’autres organisations de défense de la liberté de l’information considèrent la Section 40 comme une menace, notamment la disposition qui stipule que les éditeurs de presse ne faisant pas parti d’un organisme de réglementation approuvé par l’État, doivent payer les frais de réclamations contre eux, qu’ils soient justifiés ou non.


En revanche, les programmes des partis travailliste et libéral-démocrate indiquent qu’ils mettraient en œuvre la deuxième étape de la Leveson Inquiry.


« RSF accueille favorablement les dispositions des programmes qui visent à renforcer la protection de la liberté de la presse, comme les plans des conservateurs de révoquer la Section 40 de la Crime and Courts Act 2013, et ceux du parti libéral-démocrate de mettre fin aux pouvoirs de surveillance en masse et aux tentatives d’affaiblir le chiffrement. Mais la liberté de la presse reste menacée et les élections se déroulent dans un climat préoccupant où les médias sont constamment limités. Nous demandons au prochain gouvernement de faire de la liberté de la presse une priorité », déclare Rebecca Vincent, directrice du bureau RSF au Royaume-Uni.


En revanche, le programme du parti conservateur indique clairement que le projet d’abandonner la Human Rights Act serait revu à l’avenir, ce qui aurait de sérieuses implications sur la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales, y compris la liberté de la presse. Le programme conservateur indique que le parti « ne révoquera ni ne remplacera la Human Rights Act , tant que le Brexit est en cours mais qu’il révisera le cadre juridique des droits de l’homme après cela », s’engageant seulement à « rester signataires de la Convention européenne des droits de l’homme pour la durée du prochain parlement ».


Les partis travailliste et libéral-démocrate, eux, s’engagent à protéger la Human Rights Act, les libéraux-démocrates ajoutant qu’ils s’opposent à toute tentative de quitter la Convention européenne des droits de l’homme.


Autre fait marquant : les libéraux-démocrates s’engagent à « réduire les pouvoirs de surveillance de l’État en éliminant la collecte en masse et aveugle des données de communication, le piratage en bloc et la collecte de fichiers de connexion Internet », et à « s'opposer aux tentatives des conservateurs d’affaiblir le chiffrement »…


Ces dispositions s’accordent avec les demandes de RSF dans le contexte de l’adoption et de la mise en œuvre de l’Investigatory Powers Act. Aussi nommée « Charte des fouineurs », cette loi élaborée par Theresa May quand elle était secrétaire d’État à l’Intérieur, est la « législation de surveillance la plus extrême au Royaume-Uni » et RSF a mis en garde qu’elle peut signer la mort du journalisme d’investigation car elle ne protège pas suffisamment les lanceurs d’alerte, les journalistes et leurs sources.


D’autres menaces à la liberté de la presse sont restées sans réponse dans les programmes électoraux. Par exemple, les trois partis ne précisent pas leurs positions sur la proposition alarmante de la Commission du droit relative à une nouvelle « loi sur l’espionnage » qui faciliterait l’étiquetage des journalistes comme « espions » et leur emprisonnement pour un maximum de 14 ans pour avoir obtenu des fuites d’information. RSF considère cette proposition comme l’une des plus grandes menaces pour la liberté de la presse au Royaume-Uni.


Dans le contexte des élections au Royaume-Uni, RSF a déjà dénoncé la manière dont ont été traités pendant la campagne des partis conservateur et travailliste plusieurs journalistes et critiqué le refus de Theresa May et de Jeremy Corbyn de participer aux débats télévisés. RSF appelle à nouveau tous les candidats à respecter la liberté de la presse pendant leur campagne.


Le Royaume-Uni a perdu deux places au Classement 2016 sur la liberté de la presse établi par RSF et occupe à présent la 40e place sur 180 pays.


Informations presse : Rebecca Vincent à [email protected] ou au +44 (0)7583 137751

Publié le
Updated on 19.05.2017