Des professionnels des médias continuellement en proie à de graves exactions

Reporters sans frontières est profondément choquée par les derniers événements qui ont, une fois encore, ébranlé le secteur des médias de manière particulièrement violente. Trois journalistes de la chaîne locale Fezzan TV - Zeidan Al-Mahdi, Adel Al-Sharif et Abdallah Mohamed Abu Azbah - ont été enlevés, le 18 janvier 2014, alors qu’ils couvraient les affrontements sur la base militaire de Tamenhint, à environ 30 km de la ville de Sabha (Sud-Ouest). Tout laisse à penser que ce kidnapping est le fait de partisans de Mouammar Kadhafi qui venaient de prendre d’assaut la base. Les journalistes ont été libérés vingt-quatre heures plus tard. Violemment frappés par les assaillants lors de leur enlèvement, ils ont été immédiatement transférés à l’hôpital une fois relâchés d’après un des présentateurs de la chaîne, Nabil As-Sokni. Le 15 janvier, vers trois heures du matin, l’immeuble où réside le rédacteur en chef du quotidien indépendant Libya Al-Jadida, Mahmoud Al-Misrati, a été la cible d’un tir de roquette. Selon l’AFP, qui a pu s’entretenir avec le journaliste, “la roquette aurait raté de peu sa cible, la fenêtre de son appartement, pour heurter un pilier, sans faire de grands dégâts.” Depuis six mois, Mahmoud Misrati est victime d’une véritable campagne de menaces par téléphone et via ses comptes de réseaux sociaux, allant de messages d’intimidation à des menaces de mort en passant par des menaces à l’encontre de ses proches. En décembre dernier, le correspondant et responsable du bureau de la chaîne satellitaire Al-Aan, Mohamed Al-Gharyani a été menacé par des hommes armés, qui dépendraient du ministère de l’Intérieur. Ces tentatives d’intimidation sont intervenues suite à la diffusion d’un épisode du programme « Libya Tawa » (Libya Maintenant), donnant la parole à une prisonnière politique qui témoignait sur les conditions de son incarcération dans une prison libyenne. Les hommes armés ont alors insulté le journaliste, en l’accusant d’être “un homme laïc”, et ont menacé de fermer le bureau de la chaîne tout en le sommant fortement de quitter la Libye. Depuis plusieurs mois, Mohamed Al-Gharyani fait face à de nombreuses menaces en raison de ses activités professionnelles. Près de trois ans après le début de la révolution libyenne, le nouvel Etat nord-africain se trouve dans une situation politique particulièrement instable et évolue dans un environnement sécuritaire proche du chaos. L’absence quasi totale d’Etat de droit affecte considérablement les professionnels des médias qui continuent de subir intimidations, menaces, violences, enlèvements, voire assassinats. Reporters sans frontières réitère sa forte inquiétude et insiste fortement sur l’urgence, pour le gouvernement de transition, de mettre un terme au règne des milices. Il est impératif que les autorités mettent en place un système fiable et transparent de responsabilité judiciaire afin de briser le cycle d’impunité qui prévaut jusqu’à présent en Libye, avec pour objectif de garantir la sécurité des professionnels de l’information.
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Updated on 20.01.2016