Danger international pour la liberté d'expression sur Internet

Reporters sans frontières exprime sa grande inquiétude au sujet de la conclusion prochaine d'un éventuel traité ACTA (anti-counterfeiting trade agreement), dont les mesures représentent un réel danger pour la liberté d'expression sur Internet, malgré le but du projet de lutter contre le piratage et la contrefaçon des œuvres protégées par les droits d'auteur. La prochaine rencontre entre ses organisateurs se déroulera du 26 au 28 janvier 2010 à Mexico. Les négociations ont lieu de manière confidentielle entre trente-neuf Etats à ce jour, dont l'Australie, le Maroc, le Mexique, la France, l'Union européenne et les Etats-Unis, sans concertation des ONG et de la société civile. Le Parlement européen n'a même pas eu accès aux documents. Il est fort regrettable que des discussions pouvant avoir de fortes incidences sur une liberté fondamentale comme la liberté d'expression se tiennent à l'écart du débat démocratique. Cette exigence de transparence en la matière n'est pas négociable ni soumise à des impératifs économiques. Reporters sans frontières demande aux membres de l'Union européenne et aux autres gouvernements de s'expliquer sur les mesures qui mettraient en grave péril la liberté d'expression sur Internet : - Interdiction des moyens de contournement de filtrage ou blocage qui empêcherait les citoyens de contourner la censure en Iran ou en Chine par exemple ; - Coupure d'Internet et donc limitation de l'accès à l'information malgré le fait que sanctionner ceux qui téléchargent n’empêchera jamais la contrefaçon elle-même ; - Mise en place d'un filtrage automatique, une limitation de la liberté d'expression, qui, sans intervention du juge, est illégale. Voir et signer la lettre ouverte au Parlement européen signée par la Quadrature du Net, Reporters sans frontières, Electronic Frontier Foundation, ASIC, Consumers International et une trentaine d'autres organisations : "L'Accord Commercial Anti-Contrefaçon (ACTA) est un large accord intergouvernemental en cours de négociation allant des questions sociales essentielles d'accès aux médicaments(1) à la régulation pénale d'Internet. Nous craignons que cet accord ne nuise sérieusement à l'innovation européenne dans le marché unique numérique, tout en portant atteinte aux libertés fondamentales et à la démocratie dans son ensemble. Le processus de négociation pose en lui-même d'importantes questions de transparence et de respect des processus démocratiques, étant donné que le contenu du projet d'accord a été tenu secret depuis plus de 18 mois, et ce bien que certains détails des propositions aient récemment fait l'objet d'une fuite. Plus inquiétant encore, alors que le Parlement européen s'est vu refuser l'accès aux documents, l'industrie américaine y a eu accès, après avoir signé des accords de non-divulgation. Une récente analyse de la Commisson européenne(2) concernant le chapitre Internet de l'ACTA démontre que les questions en cours de discussion vont bien au-delà de l'acquis communautaire. Plus important, l'analyse de la Commission confirme que le document de travail actuel de l'ACTA restreindrait profondément les droits et libertés des citoyens européens, principalement la liberté d'expression et la protection des communications privées. Celles-ci sont en effet très fortement menacées, puisque le projet en cours appelle à l'adoption de dispositifs de "riposte graduée" et de filtrage de contenus en tentant d'imposer la responsabilité civile et pénale des intermédiaires techniques, tels que les fournisseurs d'accès Internet. Le texte pourrait également radicalement mettre en cause l'exercice de l'interopérabilité, qui est essentiel à la fois aux droits des consommateurs et à la compétititivé. En conséquence, nous appelons le Parlement à enjoindre les négociateurs européens à établir la transparence du processus de négociation en publiant le projet d'accord, et à ne pas accepter une proposition qui nuirait aux droits et libertés des citoyens. De plus, nous exhortons le Parlement à indiquer fermement à la Commission et au Conseil que tout accord ne respectant pas ces principes fondamentaux forcerait le Parlement à rejeter le texte dans son entier."
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Mise à jour le 25.01.2016