Damas coupable d’avoir pris les journalistes au piège avec la population de Homs

Reporters sans frontières dénonce le refus acharné des autorités syriennes d’autoriser l’évacuation des deux journalistes français Edith Bouvier et William Daniels, et du Britannique Paul Conroy, ainsi que des dépouilles de Marie Colvin et de Remy Ochlik. Arguant de prétextes fallacieux, elles font preuve d’un cynisme éhonté. L’organisation exprime sa plus vive inquiétude sur le sort d’Edith Bouvier et de Paul Conroy, tous deux blessés à la jambe lors du bombardement du centre des médias de Bab Amr, le 22 février, et exhorte les autorités à observer le cessez-le-feu et à permettre l’évacuation des journalistes, ainsi qu’à permettre aux secours d’accéder à l’ensemble de la population. Reporters sans frontières demande expressément à la Chine et à la Russie, les deux seuls pays à avoir opposé leur veto à un projet de résolution du Conseil de sécurité des Nations unies condamnant la Syrie, le 4 février 2012, de prendre leurs responsabilités et d’obtenir du gouvernement de Damas l’arrêt des violences contre la population afin d’organiser l’évacuation des professionnels de l’information, pris dans l’enfer de Homs. La Chine et la Russie ont une grand part de responsabilité dans l’extrême dégradation de la situation humanitaire et l’aggravation des violences en Syrie, en ayant bloqué ce qui aurait pu donner lieu à une initiative internationale pour résoudre le conflit. Alors qu’elle fait face à un blocus depuis plusieurs semaines et à un bombardement incessant, la population de Homs commence à manquer cruellement d’eau, de nourriture et de médicaments. Les deux pays seront absents de la conférence des “Amis de la Syrie” qui se tient ce 24 février 2012 à Tunis pour définir un plan d'aide humanitaire international à l’intention du peuple syrien. Reporters sans frontières s’est joint à un appel pour “élaborer une stratégie internationale afin de mettre un terme aux violations des droits de l’homme en Syrie”. Alors que des informations concordantes semblent montrer que l’armée a intentionnellement visé, le 22 février 2012, le centre des média de Bab Amr et les journalistes étrangers (lire articles du Telegraph et de Libération), le 23 février, la commission d’enquête indépendante des Nations unies sur la Syrie, présidée par Paulo Pinheiro, a remis un rapport sur les violations des droits de l’homme en Syrie rendant compte de responsabilités au plus haut niveau de l’Etat syrien et de l’armée, dans une liste restée confidentielle transmise à la Haut Commissariat des droits de l’homme des Nations unies. Les délégations russe et chinoise ne peuvent plus se voiler la face et paralyser la communauté internationale. Une réunion spéciale du Conseil des droits de l’homme qui se tiendra la semaine prochaine à Genève doit être l’occasion d’une prise de position unanime contre le régime de Bachar Al-Assad. Dans une vidéo postée sur Youtube le 23 février 2012, la journaliste française freelance travaillant entre autres pour Le Figaro, Edith Bouvier, qui souffre d’une fracture courant du fémur à la jambe, et le photographe William Daniels, en bonne santé, témoignent de leur situation et du besoin d’un rapatriement médicalisé pour la journaliste du Figaro. Le journaliste britannique Paul Conroy, a été touché trois fois à la jambe. Leurs confrères, le photographe français, Rémi Ochlik, et la journaliste américaine, Marie Colvin, ont trouvé la mort lors de l’attaque. Au total, neuf professionnels de l’information ont déjà trouvé la mort en Syrie en lien avec leurs activités. Le journaliste français Gilles Jacquier de France 2 a été tué le 11 janvier dernier à Homs, alors qu’il était entré légalement dans le pays. Le journaliste syrien Shoukri Ahmed Ratib Abu Bourghoul, touché par une balle en pleine tête le 30 décembre dernier, a succombé à ses blessures à l’hôpital, le 2 janvier 2012. Basil Al-Sayed, journaliste-citoyen, avait été tué à Homs le 29 décembre, alors qu’il filmait un énième bain de sang dans le quartier de Bab Amr. Visé à la tête par les forces de sécurité, il est décédé au cours de son transfert à l’hôpital. Il avait 24 ans. Le photographe et vidéaste Ferzat Jarban avait quant à lui été assassiné le 20 novembre dernier, après avoir été arrêté la veille à Homs. Enfin, Soleiman Saleh Abazaid avait été abattu d’une balle dans la tête, le 22 juillet 2011. Il était l’administrateur de la page Facebook “Liberated people of Horan”. Deux citoyens-journalistes syriens ont également trouvé la mort : Ramy Al-Sayed, du Shaam News Network, tué dans un bombardement le 21 février 2012 ; et ‘Omar le Syrien’, qui collaborait depuis deux mois avec l’Agence France-Presse, tué lors de l’important bombardement de la ville de Homs dans la nuit du 3 au 4 février dernier. De son vrai nom Mazhar Tayyara, il était âgé de 24 ans. Il était sorti secourir les blessés lorsqu’il a été atteint par un tir d’obus. Reporters sans frontières rappelle que des journalistes et militants (de la liberté de l’information) du Centre syrien pour les médias et l’information ont été arrêtés le 16 février dernier au cours d’une rafle. Les femmes ont été libérées trois jours plus tard. Neuf hommes, parmi lesquels le directeur du Centre, Mazen Darwish, sont toujours détenus.
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Updated on 20.01.2016