Confiscation du matériel de transmission d’Al-Arabiya et d’Al-Jazeera : la campagne d’intimidation contre les médias continue

Le 11 mars 2010, les autorités yéménites ont saisi les appareils de transmission de deux chaînes d’information satellitaires arabes, Al-Arabiya et Al-Jazeera, accusées de manque de neutralité dans la couverture du mouvement de protestation dans le sud du pays. « Une telle confiscation est inacceptable. En procédant ainsi, les autorités de Sanaa renforcent leur volonté d’imposer le black-out sur les opérations militaires, notamment dans le sud du pays. Le pouvoir veut se débarrasser de tous les témoins potentiels. Nous exhortons les autorités à restituer le matériel saisi et à mettre un terme à cette campagne de harcèlement et d’intimidation des médias », a déclaré Reporters sans frontières. Des agents des forces de l’ordre et de la sécurité politique ont perquisitionné dans les locaux d’Al-Jazeera et d’Al-Arabiya, le 11 mars 2010 au soir à Sanaa. Ils ont confisqué les SNG, unités mobiles de retransmission, sans que les responsables des deux chaînes aient reçu de notification de la part des autorités. Les dirigeants d’Al-Arabiya ont insisté sur le fait que le matériel était entré légalement au Yémen en 2006, “sur feu vert du président de la République”. Mahmoud Munassar, responsable du bureau de la chaîne à Sanaa, a qualifié cette mesure d’arbitraire. Pour les responsables de la chaîne Al-Jazeera, cette confiscation du matériel par la force s’inscrit dans le cadre d’une vaste “campagne d’intimidation” lancée par les autorités contre la chaîne. http://www.rsf.org/Al-Jazeera-victime-d-une-vaste.html. Pour les autorités, cette confiscation est légale, dans la mesure où le matériel saisi n’avait pas été “déclaré”. Par ailleurs, un porte-parole du ministère de l’Information a déclaré que de tels équipements “ne devraient pas servir à provoquer de troubles et à amplifier les événements de façon à nuire à l’ordre public”. Il a accusé Al-Jazeera d’avoir utilisé des images d’archives pour illustrer certains incidents récents. “Ceci constitue un encouragement au sabotage et au séparatisme de la part de certains”, a-t-il déclaré. Un membre du parti au pouvoir, cité par l’agence de presse officielle Saba, a invité la chaîne à faire preuve d’“objectivité” et de “crédibilité” dans sa couverture de l’actualité au Yémen, sans quoi “le Yémen pourrait être amené à (…) fermer le bureau d’Al-Jazeera et à ne pas autoriser ses correspondants à travailler au Yémen”. A l’occasion d’un rassemblement de solidarité avec les deux chaînes, organisé à Sanaa le 13 mars, un député de l’opposition, Abdel Razeq Al-Hajari, a annoncé son intention de demander l’audition au Parlement du ministre de l’Information Hassan Al-Lawzi, sur cette saisie de matériel. Plusieurs centaines de journalistes, de parlementaires et de représentants d’organisations de la société civile étaient présents. Le sud du Yémen, indépendant jusqu’en 1990, est le théâtre d’affrontements entre l’armée et les partisans d’une sécession, les habitants s’estimant victimes de discriminations, laissés pour compte du développement économique. La tension s’est renforcée dans le Sud, notamment depuis la signature d’un cessez-le-feu, le 11 février 2010, entre les autorités et la rébellion zaïdite dans le nord du pays.
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Updated on 20.01.2016