A Conakry, Reporters sans frontières appelle les autorités à appliquer les lois sur la presse promulguées en 2010

A l'issue d'une mission de cinq jours à Conakry, Reporters sans frontières tient, ce vendredi 27 mai 2011, une conférence de presse à la Maison de la presse pour livrer ses premières conclusions sur la situation des médias en Guinée et adresser des recommandations aux autorités du pays. La délégation, composée de Gilles Lordet, directeur de l'information, et d'Ambroise Pierre, responsable du bureau Afrique, a rencontré le collège du Conseil national de la communication (CNC), le président de la Cour suprême, la présidente du Conseil national de transition (CNT), le ministre de la Justice, des responsables des ministères de la Communication et de l'Administration du territoire et de la décentralisation, le secrétaire général du gouvernement, ainsi que les principaux acteurs de la presse et plusieurs associations de journalistes. L'organisation se réjouit de constater un climat apaisé qui permet aux journalistes de faire leur travail dans de bonnes conditions, et une vitalité nouvelle du secteur depuis l'élection présidentielle de 2010, malgré une nette précarité de la profession. Les médias affichent une liberté de ton qui tranche parfois avec ce que l'organisation observe dans certains autres pays africains. Elle constate toutefois que plusieurs questions restent en suspend, suscitant des interrogations sur la volonté du gouvernement du président Alpha Condé de consolider la liberté de la presse. Amorçant une phase de transition qui, nous l'espérons, conduira le pays vers la démocratie, processus toujours long et fragile, nous souhaitons convaincre les autorités publiques de l'importance de la liberté d'expression comme valeur démocratique. La loi sur la liberté de la presse, celle portant création de la Haute Autorité de la communication (HAC) et celle sur l'accès à l'information ont été promulguées par le général Sékouba Konaté en juin et décembre 2010. Elles attendent toujours d'apparaître au journal officiel et d'être appliquées. Reporters sans frontières a appris que trois journalistes ont été évincés, début mai, de la présentation du journal télévisé de la Radio Télévision Guinéenne (RTG). L'organisation s'interroge sur les raisons de cette décision qui leur a été simplement notifiée verbalement et demande des explications. En prévision des élections législatives qui devraient avoir lieu avant la fin de l'année, Reporters sans frontières mettra à disposition des journalistes le Guide pratique du journaliste en période électorale qu'elle a publié en collaboration avec l'Organisation Internationale de la Francophonie. Lors d'une entrevue au ministère de l'Administration du territoire et de la décentralisation, l'organisation a insisté sur l'importance du respect par les forces de sécurité du travail des journalistes lors de la couverture de la campagne et du scrutin. Reporters sans frontières publiera fin juillet un rapport qui précisera son analyse de la liberté de la presse en Guinée et détaillera l'ensemble des recommandations adressées aux autorités et aux médias. Dès aujourd'hui, à l'issue de sa mission, et avant de quitter le pays : - Reporters sans frontières invite le président de la République, Alpha Condé, à s'affirmer comme garant de la liberté de la presse et du respect du pluralisme des médias. - L'organisation demande au secrétaire général du gouvernement de transmettre sans délai les trois lois de 2010 à la Cour suprême qui examinera leur conformité à la Constitution et permettra leur publication au Journal officiel. - Partant du constat que la RTG a été saluée pour sa couverture équitable de la campagne présidentielle, Reporters sans frontières appelle les nouvelles autorités à veiller à ce qu'elle reste un média de service public accessible à toutes les forces politiques et dans lequel se reconnaît l'ensemble de la société guinéenne. - Elle invite le ministère de l'Administration du territoire et de la décentralisation à tenir un discours clair sur le respect de l'intégrité physique des journalistes et à sensibiliser les forces de sécurité au respect de leur travail, particulièrement lors de leur couverture d'une élection. - Elle demande aux autorités d'engager une réflexion sur le statut du journaliste en Guinée. - Enfin, Reporters sans frontières encourage les associations de journalistes à revendiquer collectivement l'amélioration de leurs conditions de travail (contrat professionnel, salaire minimum, etc.)
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Mise à jour le 20.01.2016