Colombie : RSF dénonce des irrégularités au sein du mécanisme de protection des journalistes

Reporters sans frontières attire l’attention sur plusieurs anomalies au sein du mécanisme de protection des journalistes colombiens (UNP) et apporte tout son soutien à Javier Osuna, visé depuis plusieurs années par des écoutes téléphoniques et victime de tentatives d’intimidation incessantes.

Lors des cinq derniers mois, le journaliste indépendant Javier Osuna a été victime de vols d’informations, de tentatives d’effraction à son bureau et d’intimidations par des hommes en moto lors de ses déplacements en voiture. Il bénéficie pourtant du dispositif de protection des journalistes (UNP) depuis le mois d’août 2014, renforcé au début de l’année 2015 après avoir vu ses ordinateurs brûlés à l’intérieur de sa maison.


L’efficacité et surtout l’intégrité de ce mécanisme de protection national pose donc question.


Suite à ces derniers événements, Osuna a en effet cherché à changer d’escorte policière et a suggéré un remplaçant, soupçonnant un lien direct entre la personne désignée par l’UNP, son enquête sur des groupes paramilitaires et la poursuite des persécutions dont il faisait l’objet. Osuna a demandé (en toute discrétion) des explications à l’UNP sur le processus de nomination au sein même de l’unité de protection. De façon illégale, ce même ‘garde du corps’ a pris connaissance de cette demande et de la réponse négative de l’UNP, qui a considéré que la personne suggérée par Osuna ‘ne remplissait pas les conditions requises’. L’UNP n’a pas fourni d’explication supplémentaire sur le processus de nomination.


Le 2 mai, un autre responsable de la sécurité d’Osuna recevait des appels téléphoniques d’intimidation sur sa ligne privée, suivis d’emails (contenant des virus) le convoquant à une audience imaginaire au tribunal, le même jour et à la même heure qu’une réunion publique au sein de l’UNP à laquelle Javier devait participer.


Ces irrégularités observées au sein même d’un organisme censé protéger les journalistes en danger sont extrêmement préoccupantes, déclare Emmanuel Colombié, responsable du bureau Amérique latine de Reporters sans Frontières. Le cas de Javier Osuna illustre les immenses difficultés rencontrées par les journalistes colombiens pour enquêter sur des sujets sensibles, et témoigne du niveau de corruption dont souffre le pays. Les autorités Colombiennes ont la responsabilité de protéger Javier Osuna, et doivent de toute urgence réformer et renforcer la transparence de l’UNP.

Découvrez le rapport "Periodistas en riesgo"Journalisme en danger

En 2015, à l’occasion des 15 ans d’existence du programme de protection, Reporters sans Frontières, la Fundación para la Libertad de Prensa (FLIP) et la Federación Colombiana de periodistas (FECOLPER) lançaient la campagne Periodismo en Riesgo (journalisme en danger) pour pointer les failles du mécanisme et proposer une réforme du programme.


Ce n’est pas la première fois que Javier Osuna dénonce l’acharnement dont il est la cible. En septembre 2014, il publiait une lettre publique, relayée par RSF, décrivant les conditions de travail des journalistes d’investigation et le peu de considération pour la profession de journaliste dans son pays.


La Colombie se classe 134ème au palmarès mondial de la liberté de la presse 2016 établi par RSF

Publié le
Updated on 11.05.2016