Cinq chaînes de télévision interdites pour un mois

Le Haut Conseil de l'Audiovisuel (RTÜK) a décidé, le 3 juillet 2003, d'interdire pendant un mois la diffusion de cinq chaînes de télévision appartenant à la famille de Cem Uzan, homme politique et magnat de la presse, pour avoir défendu sur leur antenne les intérêts privés de la famille Uzan. "Si la plainte pour diffamation déposée par le Premier ministre contre M. Uzan paraît légitime, la peine d'un mois d'interdiction infligée aux chaînes de télévision est en revanche injuste et disproportionnée", a déclaré Robert Ménard secrétaire général de Reporters sans frontières, dans un courrier adressé à Fatih Karaca, président du RTÜK. "Nous vous demandons de revenir sur votre décision qui pourrait être interprétée comme une mesure à caractère politique et qui sanctionne davantage les médias eux-mêmes que les propos tenus par M. Uzan", a-t-il ajouté. Le RTÜK reproche aux chaînes de télévision privées Star TV, Kanal 6, Star Max, Star 6 Heyecan TV et Footgol Star 8 TV d'avoir diffusé, les 13 et 14 juin 2003, les critiques virulentes de Cem Uzan, qui contrôle ces médias, envers le Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan. Dans un discours prononcé à Bursa (nord-ouest du pays), Cem Uzan avait critiqué l'annulation par le ministère de l'Energie et des Ressources naturelles d'un contrat avec les sociétés de gestion d'électricité Cukurova et Kepez, appartenant à la famille Uzan, et attaqué Recep Tayyip Erdogan, ainsi que son parti de la Justice et du Développement (AKP), islamiste modéré. Cem Uzan dirige un nouveau parti politique, "Jeune", susceptible, selon certains sondages, de représenter une menace à l'avenir pour le parti au pouvoir. Le Premier ministre a engagé une procédure judiciaire pour diffamation à l'encontre de Cem Uzan. Le RTÜK, pour sa part, a accusé les chaînes de télévision du groupe Uzan d'avoir "publié des émissions défendant l'intérêt injuste de leur patron, de leurs actionnaires et des membres de la famille". L'article 4 alinéa (c) de la loi 3984 du RTÜK sanctionne, depuis mai 2002, ce délit d'une peine d'un mois d'interdiction de diffusion. Le RTÜK a également demandé des explications aux chaînes de télévision Flash TV, Star 4, Star 5, Star 7 et New TV, du groupe Uzan, et à la chaîne privée Habertürk qu'il accuse du même délit, mais aussi d'offense et d'incitation à la concurrence déloyale. Reporters sans frontières rappelle que la réforme de la loi sur les médias de mai 2002 a aggravé ses aspects les plus répressifs et permis une mainmise renforcée du pouvoir politique sur le RTÜK.
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Updated on 20.01.2016