Reporters sans frontières dénonce le caractère restrictif des conditions d'accès de la presse à la zone de négociations avec les paramilitaires

"Le délai de trois jours donné aux journalistes à compter du 15 juin pour solliciter une accréditation risque de pénaliser en particulier les envoyés spéciaux de la presse étrangère qui ne découvriront ces restrictions qu'après le début des négociations", a notamment déclaré Reporters sans frontières dans une lettre adressée au haut-commissaire pour la paix.

Reporters sans frontières est préoccupée par le caractère restrictif de certaines des conditions dictées aux journalistes pour se rendre dans la zone où auront lieu les négociations entre le gouvernement et les principaux leaders des Autodéfenses unies de Colombie (AUC, paramilitaires). "Le délai de trois jours donné aux journalistes à compter du 15 juin pour solliciter une accréditation pour des négociations prévues pour durer six mois est excessivement court. Il risque de pénaliser en particulier les envoyés spéciaux de la presse étrangère qui ne découvriront ces restrictions qu'après le début des négociations", a déclaré Reporters sans frontières dans une lettre adressée à Luis Carlos Restrepo, haut-commissaire pour la paix. "L'obligation pour la presse de retirer ces accréditations à Bogotá risque également de désavantager les publications de province qui souhaiteraient couvrir l'événement et qui ne disposent pas de représentant à Bogotá", a ajouté l'organisation. "Si l'on peut comprendre la nécessité d'accréditer les journalistes qui se rendront sur place, en revanche le délai imposé est au mieux inutile, au pire dangereux pour la liberté de la presse", s'est inquiétée Reporters sans frontières. "Nous vous demandons par conséquent de supprimer toute limitation dans le temps pour l'attribution d'accréditation", a demandé l'organisation à Luis Carlos Restrepo. "Votre volonté de ne pas faire de ces négociations un "show" médiatique ne doit pas vous conduire à empiéter sur la liberté de la presse", a conclu l'organisation. Le 15 juin 2004, le service de presse du haut-commissaire pour la paix a communiqué aux journalistes la procédure à suivre pour être autorisé à pénétrer dans la zone de Tierralta (département de Córdoba, Nord-Ouest) où se tiendront à partir du 1er juillet prochain et pour six mois les négociations de paix entre le gouvernement et les groupes paramilitaires des AUC. Le communiqué pécise que les rédactions ont jusqu'au 18 juin pour présenter leur demande d'accréditation dans laquelle elles devront préciser l'identité des journalistes qu'elles souhaitent envoyer à Tierralta. Le document ajoute que les accréditations ne pourront être retirées qu'au service de presse du haut-commissaire pour la paix à Bogotá et uniquement les 24 et 25 juin. Il souligne que les médias qui ne respecteront pas la procédure "ne pourront pas entrer dans la zone concernée". Contacté par Reporters sans frontières, le service de presse du haut-commissaire pour la paix a expliqué que les critères d'attribution des accréditations devraient faire l'objet d'une application souple. Il a expliqué qu'une demande d'accréditation qui parviendrait aux autorités le 15 juillet sera examinée, et non pas immédiatement rejetée, ou qu'une rédaction souhaitant obtenir une accréditation pour un second journaliste afin de remplacer le premier devrait obtenir satisfaction. A la question de savoir pourquoi a été imposé un délai de seulement trois jours, le service de presse a expliqué : "En Colombie, où nous attendons souvent la dernière minute pour faire les choses, il est nécessaire d'imposer un délai." Le 16 mai dernier, Luis Carlos Restrepo avait déclaré : "Le processus (de négociations) sera austère et il n'y aura pas de show", en référence aux négociations menées par le président Andrés Pastrana (1998-2002) avec la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) dans une zone de négociations dont l'accès n'avait, à leurs débuts, fait l'objet d'aucun contrôle.
Publié le
Mise à jour le 20.01.2016