Le journaliste Haci Bogatekin risque treize ans de prison pour avoir dénoncé la partialité d'un procureur

Le 2 décembre 2008, treize ans de prison ont été requis contre le journaliste Haci Bogatekin, propriétaire du bimensuel Gerger Firat, poursuivi en raison d'un article dans lequel il dénonçait la partialité d'un procureur ayant initié des poursuites contre lui pour un article critiquant l'influence d'un leader religieux dans la région. Le responsable du site Internet qui avait repris les propos du journaliste, considérés comme délictueux, est également poursuivi et risque quatre ans et demi de prison. “C'est une honte ! Haci Bogatekin a déjà passé cent neuf jours en détention pour cette affaire. Le traitement dont il fait l'objet ne se justifie en rien au regard des infractions dont il est accusé. Il s'explique en revanche par la volonté de punir un journaliste qui dénonce les abus de pouvoir d'un magistrat, attaquant indûment la liberté de la presse”, a déclaré Reporters sans frontières. Le 2 décembre, le journaliste a comparu pour la septième fois devant le tribunal correctionnel de Gerger (préfecture d'Adiyaman, sud-est de la Turquie) où il est jugé pour “insulte”, “diffamation” et “tentative d'influencer le bon déroulement d'un procès”. Le procureur Sadullah Ovacikli avait initié des poursuites contre lui après la parution, en janvier 2008, d'un éditorial intitulé "Feto et Apo". Haci Bogatekin y affirmait que les mouvements religieux et les groupes kurdes rivalisaient pour réunir des soutiens dans la région. Il accusait également l'armée turque - perçue par la population comme le gardien de l'ordre laïc - d'abandonner les villes à l'influence des communautés religieuses. Quelques jours plus tard, il a été convoqué par les autorités judicaires et menacé de poursuites par Sadullah Ovacikli, s'il ne revenait pas sur ses déclarations concernant une puissante communauté islamiste, liée au prédicateur Fethullah Gülen. Haci Bogatekin avait rendu publiques les menaces qu'il avait reçues dans les pages du site gergerim.com. Il avait également affirmé avoir trouvé des éléments indiquant que le procureur était lié au mouvement islamiste de Fethullah Gülen, qui regroupe plusieurs millions de sympathisants et de membres en Turquie. Haci Bogatekin a porté plainte auprès du ministère de la Justice et du Haut conseil de la magistrature (HSYK). Mais, le 13 avril, il a été placé en détention préventive et n'a été remis en liberté que le 30 juillet, après cent neuf jours de privation de liberté. Malgré la requête du journaliste, la présidente du tribunal, la juge Aysegül Simsek, a jugé inutile, pour instruire l'affaire, d'attendre le document attestant de l'état de la procédure engagée par le journaliste contre le procureur. Elle a fixé la prochaine audience au 5 février 2009.
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Updated on 20.01.2016