Condamnation invraisemblable de Magnus Berglund par la cour de Ljubljana

Reporters sans frontières dénonce avec la plus grande fermeté la décision de la cour de Ljubljana du 13 décembre 2011, condamnant conjointement le journaliste finlandais Magnus Berglund et la télévision publique finlandaise YLE à une amende de 15 000 euros et à la publication d’un démenti sur les télévisions publiques slovènes et finlandaises pour des propos diffamatoires portés à l’encontre de l’ancien Premier ministre Janez Janša. Un ancien commissaire de la police slovène, Bojan Potocnik, qui témoigne dans le même programme, est par ailleurs condamné à verser une amende de 6 500 euros de dommages et intérêts. Dans son émission « Truth about Patria » du 1er septembre 2008 diffusée sur la chaîne de télévision finlandaise YLE, Magnus Berglund a publié une enquête sur l’achat par le gouvernement slovène de véhicules blindés qui aurait fait l’objet de commissions illégales. Sur les 275 millions d’euros consacrés au marché public, Janez Jansa, de hauts fonctionnaires slovènes, des militaires de haut rang ainsi que certains politiciens auraient perçu près de 20 millions d’euros. Nous sommes scandalisés par la décision de la cour qui s’appuie sur une procédure douteuse et inacceptable dans un système judiciaire européen. Alors que Magnus Berglund et YLE souhaitaient être interrogés et présenter leur défense, le juge Matej Papler n’a jugé bon que d’entendre le point de vue de Janez Janša, motivant sa décision sur le fait que l’information diffusée dans le programme de télévision constitue une preuve insuffisante pour accuser Janes Jansa de corruption. Il faut être d’une rare mauvaise foi pour exiger de Magnus Berglund et de YLE des preuves supplémentaires alors qu’on leur interdit de les produire ! Nous attirons par ailleurs l’attention du juge Papler sur le fait qu’il ne dispose probablement pas des compétences nécessaires pour imposer la publication d’un démenti sur la télévision publique finlandaise. Nous aurions souhaité un peu plus de cohérence de la part de la justice slovène dans cette affaire. Nous rappelons que le ministre de la Justice a confirmé au début du mois de décembre 2011 que 84 pages de preuves d’un dossier d’instruction lié à l’affaire Patria ont mystérieusement disparu et doivent être considérées comme perdues à jamais ! La justice slovène devrait veiller à ne pas exiger dans ce dossier les preuves qu’elle a curieusement tendance à égarer. Nous exigeons que la cour de Ljubljana reconsidère dans les plus brefs délais cette décision prise au mépris des droits de la défense. Si la cour souhaite absolument poursuivre Magnus Berglund, elle doit organiser une nouvelle audience publique afin que toutes les parties du procès soient entendues et qu’une décision de justice équitable soit rendue. Nous rappelons par ailleurs que l’ancien Premier ministre Janša fait l’objet de poursuites dans un procès qui clôture trois années d'une enquête des services de police de la Finlande, de l’Autriche et de la Slovénie, coordonnée par Interpol et Eurojust. Une trentaine de suspects venant des trois pays sont accusés d’espionnage et de corruption. Le procès en Autriche doit s’ouvrir en janvier prochain alors que celui en Finlande débutera au printemps 2012.
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Updated on 20.01.2016