Tunisie : RSF dénonce une escalade répressive à l’encontre des journalistes

Deux chroniqueurs critiques des autorités tunisiennes, arrêtés samedi, ont été placés sous mandat de dépôt. Le même jour, l’équipe de la chaîne française d’informations internationales France 24 a, quant à elle, été prise à partie par les services de sécurité, à Tunis, alors qu’elle couvrait l’arrestation d’une avocate. Reporters sans frontières (RSF) dénonce cette escalade répressive et exige la libération immédiate des journalistes détenus. 

Deux journalistes tunisiens, travaillant pour la chaîne de radio privée IFM et la télévision Carthage +Borhen Bsaïes, présentateur, et Mourad Zeghidi, chroniqueur, ont été arrêtés samedi 11 mai à Tunis et placés en détention. Ils ont été placés sous mandat de dépôt en attendant leur comparution devant un juge d'instruction, a indiqué, à RSF, l'avocat de Mourad Zeghidi, Ghazi Mrabet. Leur garde à vue a été prolongée de 48h ce lundi 13 mai. 

Mourad Zeghidi est poursuivi, selon son avocat, « pour une publication sur les réseaux sociaux dans laquelle il soutenait Mohamed Boughalleb, journaliste condamné à 6 mois de prison pour diffamation et des déclarations lors d'émissions télévisées depuis février ». Le journaliste Borhen Bsaïes aurait été arrêté, selon son avocat, en vertu du liberticide décret-loi 54 censé lutter contre les «fausses informations et rumeurs» sur Internet, régulièrement utilisé pour museler la presse et porter atteinte à la liberté d’expression. 

Le même jour, samedi 11 mai, alors que la police procédait à une arrestation brutale de l’avocate Sonia Dahmani à la Maison des avocats, la correspondante de France 24Maryline Dumas, présente sur les lieux a été prise à partie. Les policiers l’ont malmené et ont embarqué le cameraman Hamdi Tlili, qui a été frappé avant d’être relâché après plusieurs heures de détention. 

« La mise en détention de deux chroniqueurs et l'agression subie par l'équipe de France 24 sont les signes d'une escalade très inquiétante de la répression en Tunisie. C'est une attaque frontale contre la liberté de la presse et une volonté affichée d’entraver l’exercice du journalisme et de contraindre les professionnels tunisiens à renoncer à des avancées en la matière obtenues de haute lutte. RSF est aux côtés des professionnels d’information tunisiens pour que cesse ces graves entraves, signaux du raidissement conservateur d’un pouvoir de plus en plus autoritaire.

Khaled Drareni
Représentant de RSF en Afrique du Nord

“Je venais de commencer mon direct. Hamdi me faisait des gestes. J'ai d'abord pensé à un problème technique. Lorsque j’ai tourné la tête, j'ai vu des hommes cagoulés entrer. Ils n'ont pas indiqué qui ils étaient. Ils ont emmené l’avocate Sonia Dahmani sous les protestations de ses collègues de la Maison des avocats. Nous étions toujours en live sur France 24. Une dizaine d'hommes sont revenus. Ils ont voulu saisir la caméra. Hamdi a essayé de les en empêcher. Nous avons tous deux crié que nous étions enregistrés et que nous avions les autorisations.

Maryline Dumas
Correspondante de France 24 en Tunisie

Maryline Dumas qui travaille en Tunisie depuis neuf ans, indique à RSF, que Hamdi Tlili a été frappé lors de son interpellation. Des avocats, qui cherchaient à s'interposer, ont également reçu des coups.

La situation de la liberté de la presse s’est dégradée ces derniers mois en Tunisie, en partie à cause du recours systématique au décret-loi 54. Adoptée le 16 septembre 2022, cette disposition relative à la lutte contre les infractions se rapportant aux systèmes d'information et de communication a suscité dès le début des inquiétudes dans les médias et au sein de la société. RSF continue de réclamer l’abrogation de ce décret-loi. 

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