Elon Musk vs la démocratie au Brésil : RSF appelle le gouvernement à renforcer son projet de loi sur la régulation des plateformes face aux enjeux de désinformation
Elon Musk a annoncé s’opposer à la justice brésilienne qui avait demandé le blocage de plusieurs comptes sur X diffusant des contenus de désinformation et des appels au coup d’État. Reporters sans frontières (RSF) dénonce cet intolérable arbitraire du propriétaire de la plateforme X et appelle le gouvernement brésilien à renforcer son projet de loi sur la régulation des plateformes.
Au Brésil comme ailleurs, Elon Musk n’est pas au-dessus des lois. Pourtant, le propriétaire du réseau social X a indiqué, en ce début avril, qu’il avait l’intention de mettre fin à “toutes les restrictions” de comptes qui avaient été ordonnées par la Cour suprême et le Tribunal supérieur électoral (TSE). Pour RSF, le milliardaire se livre une fois de plus à une insupportable démonstration de l’arbitraire des grandes plateformes en matière de gestion de l’espace informationnel.
Les mesures décriées par Elon Musk ont été prises par le juge Alexandre de Moraes, en tant que président du TSE puis comme juge de la Cour suprême, dans un contexte très particulier : celui de la lutte contre les campagnes de déstabilisation de l’état de droit au Brésil orchestrées à grand renfort de désinformation par des comptes idéologiquement proches du président Jair Bolsonaro pendant l’élection présidentielle de 2022. Ces éléments de désinformation avaient en très grande partie contribué à la tentative de coup d’État du 8 janvier 2023.
“Elon Musk fait preuve d’un arbitraire inacceptable et démontre une fois de plus que les plateformes doivent être fermement encadrées par des lois nationales permettant une gouvernance internationale. Dans le même temps, le vide réglementaire au Brésil concernant les obligations des utilisateurs de comptes permet aux acteurs politiques d'instrumentaliser le droit à la liberté d'expression dans le pays. La meilleure réponse que le Brésil puisse apporter est d'aller de l'avant dans la régulation des plateformes numériques.”
Artur Romeu
Directeur du bureau de Rio de RSF
Si les mesures prises par Alexandre de Moraes à la suite des élections de 2022 et des émeutes du 8 janvier 2023 n’ont plus nécessairement lieu d’être, il ne revient pas à Elon Musk d’en décider.
C’est pour cette raison que RSF invite le gouvernement brésilien à renforcer le projet de loi sur la régulation des plateformes (PL 2630), inspiré du Digital Services Act européen, par des mesures tirées du rapport du Forum sur l’information et la démocratie consacré aux régimes de responsabilité des utilisateurs de réseaux sociaux. Parmi les recommandations phares, il est notamment nécessaire que le Brésil mette en place un système judiciaire avec des magistrats et procureurs spécialisés dans les questions de la régulation des contenus en ligne et des comptes d’utilisateurs de réseaux sociaux.
Comme le souligne le plan d'action pour la coopération entre la France et le Brésil, récemment signé par les présidents Macron et Lula, face à l’arbitraire des grandes plateformes, l’adoption de lois nationales fortes en la matière est nécessaire afin de garantir une gouvernance internationale ambitieuse de régulation des plateformes.