Procès de Stanis Bujakera en RDC : le journaliste insulté, son média calomnié
La deuxième audience du procès du journaliste congolais à laquelle a assisté Reporters sans frontières (RSF) s’est déroulée dans une atmosphère déplorable. Fébrile et sur la défensive, l’accusation a alterné entre calomnies et déductions grossières à défaut de preuves.
Poursuivis pour six chefs d’inculpation dont ceux de “propagateur de faux bruit” et de “faux en écriture, falsification des sceaux de l’État”, le journaliste Stanis Bujakera Tshiamala a été qualifié de “Satan” par le procureur lors de la deuxième audience de son procès à laquelle plusieurs membres de RSF et des représentants diplomatiques ont assisté ce vendredi 20 octobre. En grande difficulté dès l’ouverture des débats sur le fond du dossier, incapable de présenter la moindre preuve, l’accusation a même tenté de jeter le discrédit sur Jeune Afrique, le magazine d’information pour lequel travaille le journaliste, l’accusant, sans preuve, de s’être fait des “milliers de dollars” dans cette histoire pour “salir le Congo”.
Les autorités congolaises reprochent au média la diffusion d’un article s’appuyant sur une note de l’Agence nationale de renseignement (ANR) dont elles contestent l’authenticité. Selon ce document, un autre service, celui du renseignement militaire, serait impliqué dans la mort de Chérubin Okende, le porte-parole d’un opposant politique, assassiné en juillet dernier. Stanis Bujakera, qui n’est pas signataire de cet article publié dans Jeune Afrique le 31 août, est accusé d’avoir transmis cette note à sa rédaction. Il avait été arrêté le 8 septembre dernier et reste depuis incarcéré à Makala, la prison centrale de Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo.
Cette deuxième audience confirme que l’accusation ne dispose d’absolument aucun élément pour justifier les graves charges qui pèsent contre le journaliste. Plus inquiétant peut-être, les insultes et les calomnies visant le journaliste et son média, ces tentatives de les salir à défaut de pouvoir justifier les poursuites en cours, ne semblent pas avoir pour but de faire éclater la vérité. Combien d’audiences peuvent-elles se tenir dans ces conditions? Il est temps de mettre fin à ce mauvais procès. Stanis Bujakera doit être libéré.
Après avoir fouillé l’ensemble des téléphones portables du journaliste au cours de la procédure, ce qui porte atteinte au secret de ses sources, l’accusation n’a trouvé aucune trace de la transmission dudit document à Jeune Afrique. Tout en reconnaissant que d’autres journalistes avaient obtenu cette note, elle accuse pourtant Stanis Bujakera d’avoir créé un faux. Interrogé par la défense sur le sceau qui aurait été utilisé pour fabriquer ce document, l’accusation a demandé, pendant l’audience, au journaliste emprisonné depuis un mois et demi de le fournir…
De son côté, les avocats du journaliste ont tenté de retarder l'ouverture du débat sur le fond au motif que l'accusation n'avait pas présenté certaines pièces et témoignages sur lesquels elle fonde ses charges. Réponse du ministère public: “si le dossier est vide, le prévenu ne devrait pas avoir peur de l'instruction”. On aimerait le croire...
La prochaine audience aura lieu le 3 novembre.
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