La correspondante de RSF à Gaza Ola Al Zaanoun est sortie du territoire avec le soutien de l’organisation : “je n'avais jamais pensé que j'aurais un jour à couvrir la mort de dizaines de mes collègues”
Après quatre mois de couverture de la guerre, la correspondante palestinienne de Reporters sans frontières (RSF) est désormais en sécurité hors de Gaza bombardée par Israël depuis le 7 octobre. RSF exprime son immense soulagement de savoir Ola Al Zaanoun désormais protégée et salue le courage de la reporter. L’organisation appelle également à la protection des journalistes toujours à Gaza.
Après des semaines de mobilisation de RSF avec l'Agence France-Presse (AFP) auprès des diplomaties les plus influentes pour qu’elle obtienne une autorisation de sortie, la journaliste gazaouie, correspondante de l’organisation, Ola Al Zaanoun a pu quitter l’enclave palestinienne. “Je remercie les efforts conjugués de tous ceux qui ont contribué à cela, dont l’organisation avec laquelle je travaille, Reporters sans frontières”, a-t-elle aussitôt témoigné lors de son atterrissage à Doha, ce jeudi 15 février.
Partie de Rafah, qu’elle avait rejoint après avoir dû quitter son logement dès le début de la guerre, la journaliste est désormais en sécurité au Qatar. Quatre de ses enfants, et plusieurs membres de familles des correspondants de l'Agence France Presse (AFP) à Gaza, ont aussi pu quitter le territoire palestinien et embarquer à bord d'un avion militaire de l'Égypte vers le Qatar.
Correspondante de RSF à Gaza depuis 2018, Ola Al Zaanoun a couvert plusieurs guerres depuis Gaza, mais elle confie à RSF : ”Jamais je n’aurai pensé qu'au cours de ma carrière, j'aurais à documenter le meurtre de plusieurs dizaines de mes collègues.” À ce jour, au moins 100 journalistes ont été tués à Gaza sous des bombardements israéliens, dont au moins 21 dans l’exercice de leurs fonctions. Chaque jour, depuis le 7 octobre, Ola communique avec RSF pour informer en temps réel de cette terrible tragédie.
“Pendant ces quatre mois au cours desquels une centaine de journalistes ont été tués à Gaza, notre correspondante Ola Al Zaanoun a continué son travail sur le terrain avec un immense courage. Nombre de ces victimes étaient ses amis et collègues. Malgré les frappes israéliennes incessantes, le manque de ressources vitales, les coupures d'Internet et les vagues de désinformation, Ola a exercé son métier sans relâche, animée par un engagement profond dans sa mission d’informer le monde de ce qui se passe dans l’enclave palestinienne. Nous sommes très soulagés qu'elle soit aujourd’hui en sécurité. RSF réitère qu’il est inacceptable que la protection des journalistes ne soient pas aujourd’hui garanties comme l’exige le droit international. L’organisation lance une nouvelle fois un appel fort au Conseil de sécurité de l’ONU, afin qu’il fasse appliquer, en urgence, sa résolution 2222 (2015) sur la protection des journalistes."
Un matin de novembre, Ola Al Zaanoun était au téléphone avec RSF depuis Rafah lorsqu’une explosion a retenti près d’elle. "Où sont les enfants ?", s’est-elle aussitôt inquiétée avant de raccrocher. Cinq minutes plus tard, elle a rappelé le responsable du bureau Moyen-Orient de RSF, Jonathan Daguer, avec qui elle est en contact quotidien. Ses enfants sont sains et saufs, les frappes israéliennes ont touché la maison voisine. "C'est comme ça içi. Nous sommes reconnaissants d'être en vie", glisse-t-elle avec soulagement et un certain fatalisme.
Une semaine après le début de la guerre, la maison d’Ola et de sa famille dans la ville de Gaza a été endommagée par un bombardement à proximité. Deux nuits plus tard, Ola, quatre de ses enfants et son mari Adel Al Zaanoun, le correspondant de l'AFP à Gaza, ont évacué leur habitation sans savoir s’ils pourront y revenir un jour. En novembre, alors qu’elle est installée à Rafah avec ses proches, la journaliste s’est fracturée la cheville en sautant du deuxième étage d’une maison pour se mettre à l'abri d'une frappe israélienne. Malgré tout, la journaliste n’a jamais cessé son travail.
Agée de 43 ans, Ola est journaliste par vocation et aussi par transmission. L’information c’est une histoire de famille. Outre son mari, son frère et l’un de ses fils ont aussi choisi ce métier. "Quand je couvrais les violations commises contre un journaliste à Gaza, chaque fois je tremblais de peur qu'il s'agisse de mon mari, de mon fils, de mon frère."
Arrivée depuis moins de 24h à Doha, Ola Al Zaanoun pense à l’après : “Je ne souhaite rien de plus que de retourner après la fin de cette guerre à Gaza, confie-t-elle à RSF. Retourner dans ma maison et dans ma Gaza bien-aimée, mon premier amour".